Procès de Cédric Jubillar : face à un homme "jugé et condamné médiatiquement", ses avocats évoquent un travail de "déconstruction inédit"

Le procès de Cédric Jubillar a débuté le 22 septembre devant la cour d'assises du Tarn. Il accusé du meurtre de son épouse, Delphine, disparue de son domicile dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020.

Article rédigé par franceinfo
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Emmanuelle Franck, avocate de Cédric Jubillar, soupçonné de la disparition de sa femme Delphine, à Albi, le 30 septembre 2025. (LIONEL BONAVENTURE / AFP)
Emmanuelle Franck, avocate de Cédric Jubillar, soupçonné de la disparition de sa femme Delphine, à Albi, le 30 septembre 2025. (LIONEL BONAVENTURE / AFP)

"Médiatiquement c'est un homme qui a déjà été jugé et condamné", constate jeudi 2 octobre sur franceinfo Emmanuelle Franck, l'une des avocates de Cédric Jubillar. Avec l'avocat Alexandre Martin, elle assure la défense de l'homme de 38 ans, principal accusé du meurtre de sa femme Delphine, disparue en décembre 2020. Cédric Jubillar comparait devant la cour d'assises du Tarn. Détenu depuis juin 2021, il clame son innocence. Le verdict est attendu le 17 octobre.  

"On a réussi à tempérer les excès qu'il y avait pu y avoir dans la presse, sur un personnage présenté de manière extrêmement caricaturale", se réjouit l'avocate, qui estime qu'il était "nécessaire de temporiser un peu" ces discours en "rappelant, qu'à l'évidence, c'était quand même quelqu'un qui travaillait, qui, malgré tout, s'occupait de ses enfants".

"Les choses ont été faites à l'envers"

Alors que se déroule la deuxième semaine de procès, la défense témoigne d'un "premier travail extrêmement lourd de déconstruction, devant les jurés" à savoir "de leur enlever de la tête, tout ce qu'ils ont pu lire, ou entendre, ou voir" sur l'affaire. "C'est quand même assez inédit, pour des jurés d'arriver à un procès dont ils connaissent déjà tous les éléments", rappelle l'avocate. "Médiatiquement, c'est un homme qui a déjà été jugé et condamné", regrette-t-elle. "Heureusement que la justice, en France, ne se rend pas de cette manière-là, et que nous avons quatre semaines de débats et que les jurés se feront leur propre opinion sur la base de ce qui sera dit à l'audience".  

Ce mercredi, sur France 2, un enregistrement de Cédric Jubillar fait à son insu a été diffusé dans le 20 heures. Il s'agit d'une pièce à charge de l'enquête. "Il est tout à fait scandaleux qu'une pièce du dossier soit d'ores et déjà diffusée dans les médias, alors que le procès est en cours", s'insurge Maitre Alexandre Martin, l'autre avocat de Cédric Jubillar. "Il faudrait écouter l'enregistrement dans son ensemble, et vous y découvrirez que les deux personnes qui enregistrent Cédric à son insu, lui posent moult questions et qu'il essaie d'y répondre avec authenticité, avec sincérité, recadre l'avocat. C'est un véritable interrogatoire auquel il est soumis. Il y répond. S'il avait passé son temps à pleurer, on aurait dit 'regardez, il fait du cinéma'. Tout ça n'a pas véritablement de sens. Chacun se fera son idée."

Depuis le début du procès, la défense de Cédric Jubillar a notamment pointé du doigt les dysfonctionnements dans le travail des enquêteurs. "Ils fonctionnent malheureusement souvent avec une conviction initiale qui n'est pas cachée", tacle Emmanuelle Franck. "Dans ce dossier, dès le mois de janvier [moins d'un mois après la disparition de Delphine], des enquêteurs vont aller expliquer à des témoins principaux, qui auraient pu accessoirement être des suspects, que c'est Cédric Jubillar le coupable, qu'ils en sont sûrs à 90 %", poursuit l'avocate qui rappelle les propos des enquêteurs à propos de Cédric, "je cite dans le texte 'C'est un abruti, il a eu le cul bordé de nouilles et on est sûr que c'est lui le coupable'". Partant de ce constat, "forcément, intellectuellement, l'enquête ne pouvait pas être menée comme elle aurait dû l'être. Les choses ont été faites à l'envers", conclut-elle. 

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