Attentat de la prison de Condé-sur-Sarthe : six ans après, cinq détenus devant la cour d’assises spéciale de Paris

Michaël Chiolo, 34 ans, et quatre autres accusés comparaissent pendant un mois pour répondre de l'attaque au couteau sur deux surveillants pénitentiaires en mars 2019.

Article rédigé par franceinfo - Antoine Lifaut
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Un hélicoptère de l'armée devant la prison de Condé-sur-Sarthe (Orne) lors de l'assaut après l'attaque du 5 mars 2019 (JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP)
Un hélicoptère de l'armée devant la prison de Condé-sur-Sarthe (Orne) lors de l'assaut après l'attaque du 5 mars 2019 (JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP)

Le procès de l'attentat de la prison de Condé-sur-Sarthe, en 2019, s'ouvre lundi 2 juin 2025. Pendant un mois, Michaël Chiolo, 34 ans, doit comparaître aux côtés de quatre autres accusés, devant la cour d'assises spéciale de Paris. Il lui est reproché d'avoir attaqué deux surveillants avec des couteaux en céramique.

Le 5 mars 2019, Chiolo purge une peine de 30 ans pour meurtre. Il n'est pas dans sa cellule, ce matin-là. Il est avec sa compagne, Hanane Aboulhana, dans une unité de vie familiale (UVF), sorte d'appartement où les détenus retrouvent leurs proches. Il fait appel aux surveillants et quand deux d'entre eux entrent dans la pièce, Michaël Chiolo et sa compagne leur assènent des coups de couteaux.
Gravement blessés, les deux fonctionnaires parviennent à s'échapper et à enfermer le couple dans l'UVF. "[Mon client] voudrait comprendre pourquoi ce jour-là il a failli perdre la vie de façon purement gratuite, dit Laurent Franck Liénard, avocat d'un des deux surveillants. Aujourd'hui, il va mal, et depuis l’annonce du procès, la perspective de se retrouver face à son agresseur le rend encore plus mal."

La compagne de Chiolo tuée lors de l'assaut du Raid

Derrière la porte de l'UVF, Michaël Chiolo revendique son appartenance à l'État islamique et dit vouloir venger Chérif Chekatt, auteur de l'attentat du marché de Noël de Strasbourg perpétré trois mois plus tôt, le 11 décembre 2018 (les deux hommes ont séjourné ensemble en prison). Les policiers du Raid tentent de négocier, mais Chiolo leur fait croire qu'il a une ceinture d'explosifs. L'assaut est lancé en fin de journée. La compagne de Michaël Chiolo, Hanane Aboulhana, est tuée ; lui est blessé.

Pour l’avocat de l’assaillant, Romain Ruiz, les conditions de détention de Michaël Chiolo ont joué un rôle dans son passage à l'acte : "Il est enfermé 22 heures sur 24, explique-t-il. Il a rencontré, dans son parcours de détention, des difficultés qui l'ont marqué psychologiquement." L'avocat raconte que son client a été placé, quelques jours avant le début du procès, dans un quartier disciplinaire de la prison de Fresnes : "Il s'est élevé contre ses conditions de détention, justement. [...] La prison telle qu'elle est pensée aujourd’hui est un système autoritaire, sécuritaire et répressif." 

"Dans la prison, il y a eu un avant et un après l'attentat"

Comment le couple a-t-il pu avoir des couteaux au sein de la prison ? Selon l'instruction, la compagne de Michaël Chiolo, Hanane Aboulhana, n'a pas été fouillée lors de sa visite. Le représentant du syndicat Force ouvrière (FO) de la prison, Kevin Gripon, explique qu'il y avait une certaine souplesse à l'époque : "Normalement, [les détenus] ont le droit à cinq kilos pour les colis de Noël ou de ramadan. Je me rappelle encore d'un communiqué de FO qui parlait d'une cinquantaine de kilos reçus par une personne détenue. On achetait la paix sociale, clairement."

Kevin Gripon est surveillant dans cette prison depuis douze ans, depuis son ouverture en 2013. Il ne travaillait pas le jour de l'attentat, mais il note un avant et un après : "Ça me fait mal de dire ça, mais c'est vrai que l'attentat nous a permis d'avoir la prison qu'on a aujourd'hui." Il raconte qu'après l'attaque, des plannings de sortie ont été mis en place "et enfin respectés" que l'établissement a été doté de plus de moyens. La prison de Condé-sur-Sarthe fait partie des deux établissements sélectionnés pour accueillir les narcotrafiquants les plus dangereux, à compter de mi-octobre 2025.

Les quatre autres accusés, dans ce procès, sont des détenus soupçonnés d'avoir aidé Michaël Chiolo à préparer l'attaque. Ce dernier encourt la réclusion criminelle à perpétuité.

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