"Le mépris blesse autant que la seringue qui vous empoisonne" : au procès de Frédéric Péchier, la patiente à l'origine de l'affaire raconte son calvaire
Sandra Simard est l'une des trente victimes des empoisonnements pour lesquels l'anesthésiste de Besançon est jugé par la cour d'assises du Doubs. Rescapée d'un arrêt cardiaque pendant une opération du dos, elle se dit certaine de sa culpabilité.
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Sandra Simard a été anesthésiée à la clinique Saint-Vincent de Besançon le mercredi 11 janvier 2017 au petit matin, pour une opération des lombaires censée soulager ses douleurs récurrentes. Elle n'a rouvert les yeux que cinq jours après, le lundi 16 janvier 2017, "intubée, attachée et perdue", relate celle par qui l'enquête a débuté. C'est son cas qui a conduit Frédéric Péchier devant la cour d'assises du Doubs, poursuivi pour trente empoisonnements, dont douze mortels. "Je n'estime pas que j'ai le droit de me plaindre, parce que je suis en vie, contrairement à bien d'autres personnes", souffle Sandra Simard, qui s'exprime d'une voix douce et posée jeudi 18 septembre.
Elle sait son témoignage très attendu, mais cette femme de 45 ans aux longs cheveux auburn, vêtue d'une veste grise, contient son émotion. Elle détaille pudiquement le calvaire qu'elle a subi. A son réveil d'abord, elle relate "les hallucinations, la paranoïa, la peur" et évoque "la douleur du sternum fracturé par les massages cardiaques", après que son cœur s'est soudainement arrêté de battre, à 36 ans, alors qu'elle n'avait pas le moindre antécédent médical.
"Une infirmière m'a dit que nous étions lundi, je ne l'ai pas crue. Elle m'a montré l'horloge au-dessus de la porte. Il y avait la date et j'ai compris qu'elle disait la vérité", rapporte la quarantenaire. Elle panique, mais "malgré une multitude d'examens cardiaques, les jours passent et personne ne peut me donner d'explications", relate Sandra Simard au tribunal judiciaire de Besançon.
Elle raconte avoir dit au revoir à ses trois enfants, "comme si elle n'allait jamais les revoir", du fait des complications de son opération. "C'est la chose la plus difficile que j'ai eue à vivre." Au bout de deux mois, Sandra Simard quitte le CHU de Besançon, où elle avait été transférée au moment de son arrêt cardiaque. On lui annonce alors qu'un médecin a été mis en examen. Elle est entendue par la police judiciaire et on lui prélève quelques mèches de cheveux pour des examens complémentaires. "Ça paraissait irréel."
"Je vis dans le corps d'une vieille personne"
Après avoir pris "du recul avec les hôpitaux et la médecine en général", elle entre en centre de rééducation en décembre 2017. "Je devais rester six semaines, j'y suis restée six mois", glisse-t-elle, expliquant être toujours en proie, aujourd'hui, à "des problèmes de mémoire, une fatigue récurrente, une intolérance au bruit". Un médecin décide de lui faire passer une IRM et observe des lésions. "Je devais apprendre à faire fonctionner mon cerveau différemment", explique Sandra Simard, qui dit continuer à vivre "dans le corps d'une vieille personne", notamment en hiver, "un calvaire".
Elle affirme avoir longtemps respecté la présomption d'innocence de Frédéric Péchier, précisant même s'être opposée à son placement en détention au début de l'enquête. Après deux ans, elle dit s'être "forgé l'intime conviction de sa culpabilité". Son avocat, Frédéric Berna, lui demande comment elle a vécu les propos qu'a pu tenir l'accusé qui a dit, en parlant du cas de Jean-Claude Gandon, un autre patient victime d'un "événement indésirable grave" (un "EIG" dans le jargon médical) : "Il n'est pas mort, c'est déjà pas mal !" Son conseil fait référence à un extrait d'une écoute téléphonique recueillie par les enquêteurs.
"J'ai ressenti du mépris. Et le mépris blesse autant que la seringue qui vous empoisonne..."
Sandra Simard, victimedevant la cour d'assises du Doubs
L'avocat rappelle qu'au cours de ses écoutes, Frédéric Péchier a aussi déclaré à propos de certains patients qu'il aurait "mieux fait de les laisser crever plutôt que de les sauver" car il aurait "eu moins de problèmes". "Oui..." se souvient Sandra Simard, visiblement encore abasourdie.
Il lui demande pourquoi son opinion a changé à propos du médecin, et pourquoi elle est désormais persuadée qu'il est coupable. "On ne m'a rien vendu, j'ai simplement compris", tranche-t-elle, en référence à une phrase souvent répétée par Frédéric Péchier, qui estime que l'accusation "a vendu un dossier dans lequel il faut que je sois empoisonneur". Aux propos de l'accusé de 53 ans qui a aussi déclaré "Je veux dire MA vérité", Sandra Simard objecte : "Ce qu'on veut, c'est LA, vérité."
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