Reportage Mort de Nahel : "Ça risque de réveiller quelque chose", confient des habitants de Nanterre, partagés sur la perspective d'un procès contre le policier auteur du tir mortel

Le procureur de la République réclame un procès pour meurtre contre le policier auteur du tir mortel sur Nahel, en juin 2023 à Nanterre. Mais le procès divise les habitants : certains craignent que cela "réveille des amertumes", quand d'autres estiment qu'il permettra de "tourner cette page".

Article rédigé par Agathe Mahuet
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Une fresque rend hommage à Nahel, tué en juin 2023 à Nanterre (Hauts-de-Seine) par un policier. Photo prise le 6 juin 2024. (GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP)
Une fresque rend hommage à Nahel, tué en juin 2023 à Nanterre (Hauts-de-Seine) par un policier. Photo prise le 6 juin 2024. (GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP)

La crainte de nouvelles tensions. Le parquet de Nanterre a requis mardi 4 mars un procès pour meurtre contre le policier ayant tiré sur Nahel, adolescent de 17 ans dont la mort en juin 2023 avait choqué l'opinion publique, devenant symbole des violences policières et à l'origine de plusieurs nuits d'émeutes à travers la France. Un juge d'instruction doit désormais trancher sur la tenue ou non du procès. Cette perspective divise pourtant les habitants de Nanterre, rencontrés par franceinfo.

À deux pas du rond-point où Nahel est mort, Salhia se souvient de la tension dans le quartier pendant des mois, et redoute qu'un tel procès jette de l'huile sur le feu. "Ça risque de réveiller encore des amertumes, des colères... Là où j'habite, ils ont tagué partout, sur tous les murs des immeubles : 'Nahel, on ne t'oublie pas', 'les flics sont les loups', décrit-elle. C'est imprégné de colère, et je me dis, mon Dieu, si ça continue comme ça, ça va encore réveiller quelque chose", s'inquiète-t-elle.

"Il y a une justice en France pour tout le monde"

Anissa, qui a emménagé ici peu après la mort de Nahel, et maman d'un fils du même âge, n'est pas d'accord. "Au contraire, je pense que ça va calmer les choses, estime-t-elle. C'est ce que demandent ces jeunes : que tout le monde soit traité de la même façon. Ils ont déjà l'impression de ne pas être traités comme les autres. Il y a une justice en France pour tout le monde, elle doit être égale pour tout le monde. Je trouve, pour ma part, que les policiers sont quand même protégés ". 

Yanis, qui a 29 ans, le confirme : ce procès pour meurtre contre le policier auteur du tir, réclamé par le procureur, serait un soulagement pour tous.

"Ça remet les pendules à l’heure, et justice sera faite, pour que la maman puisse faire son deuil."

Yanis, 29 ans

à franceinfo

Et puis cela permettrait au quartier de passer à autre chose, ajoute Kabwika, éducateur spécialisé au Gao de Nanterre, une association qui intervient auprès des jeunes. "À chaque fois que je dis aux gens que j'habite à Nanterre, ils me parlent de ça, raconte-t-il. Aujourd'hui ça permettrait à ces jeunes d'évoluer, de passer à autre chose. Ça fait deux ans, mais c'est toujours dans l'esprit des gens. Tant que la justice n'aura pas rendu son verdict, ce sera toujours quelque chose qui sera là. Mais dans la mémoire de la ville, ce serait bien de tourner cette page." 

Une certitude pour Kabwika : "On n'oubliera pas Nahel ici, mais il faut avancer".

Le reportage d'Agathe Mahuet à Nanterre

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