: Reportage Changement climatique : comment la France se prépare à passer massivement à l'énergie électrique
Objectif : arriver à la neutralité carbone d’ici 2050. Toute la semaine, franceinfo vous donne des clés pour comprendre les enjeux de ce pari. Dans le Pas-de-Calais, l'importante consommation d'une toute nouvelle usine de batteries pour voitures électriques montre l'étendue du chantier.
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Comment adapter la France au défi du changement climatique ? Le projet de loi sur l'industrie verte, visant à dynamiser une réindustrialisation décarbonée du pays, est examiné à partir de lundi 17 juillet en première lecture à l'Assemblée nationale. Le gouvernement va apporter sa réponse à l’occasion du conseil pour la planification écologique en présence d'Emmanuel Macron et d'Élisabeth Borne. Leur objectif : réduire fortement les émissions de CO2 du pays pour arriver à la neutralité carbone d'ici 2050.
La multiplication des voitures électriques est un des leviers envisagés par le gouvernement, même si cette filière n'est pas la solution miracle. À Billy-Berclau (Pas-de-Calais), à une quarantaine de minutes de Lille, un imposant bâtiment de 35 mètres de haut et de 600 mètres de long abrite depuis fin mai la toute nouvelle usine du groupe Automotive Cells Company (ACC).
Une énorme consommation d'énergie
Cette "gigafactory" de batteries pour voitures est un des symboles de cette réindustrialisation voulue par Emmanuel Macron. "On a des postes de transformation dédiés pour l'usine, qui permettent de transformer l'électricité en 20 000 et 200 000 volts", explique Sébastien Mussa Peretto, responsable environnement d'ACC, en montrant le poste électrique de RTE, le gestionnaire du réseau électrique, qui amène l'électricité sur place.
À terme, le site doit produire 800 000 batteries par an, mais la consommation d'électricité va suivre la production. "Quand on parle de gigafactory, on parle de bloc de production : la giga dans laquelle on se trouve aujourd'hui sera composée de trois blocs d'ici 2030, détaille Matthieu Hubert, secrétaire général d'Automotive Cells Company.
"En face de nous, on a le premier bloc, et pour faire tourner ce type de bâtiment, il faut compter une consommation d'environ 200 gigawatts/heure par an, soit environ la consommation d'une ville de 150 000 habitants. Si vous mettez trois blocs en parallèle, vous avez la consommation d'une ville comme Marseille."
Matthieu Hubert, secrétaire général d'Automotive Cells Companyà franceinfo
C'est à l'autre bout de l'usine, au pied de racs de rangements de plusieurs dizaines de mètres de haut que l'on trouve la principale explication à cette consommation électrique élevée. "C'est la partie du process qu'on appelle le traitement électrique, poursuit Matthieu Hubert. Ça veut dire qu'on forme électriquement la batterie, on la charge, on la décharge un certain nombre de fois, pour qu'elle soit préparée ensuite à être utilisée normalement par vous, futur client d'une voiture électrique. Tout cela nécessite pas mal de consommation d'énergie", explique le secrétaire générale d'ACC.
D'autres projets de ce type sont en projet
Des giga-usines proches de celle de Billy-Berclau doivent aussi s'implanter dans le nord de la France : une à Douai, deux à Dunkerque. Dans les Bouches-du-Rhône, à Fos-sur-mer, ce sont cette fois des giga usines de panneaux solaires qui sont prévues. "Il va falloir électrifier l'augmentation de capacité et basculer en électrique la capacité actuelle, avance Christian Saint-Etienne, économiste spécialiste de l'industrie.C'est gigantesque comme chantier : il faut doubler la quantité d'énergie qui sera donnée au secteur industriel."
"Pour faire simple, si on double en 20 ans, d'ici 2045, ce sera un miracle, ce sera Alice au pays des merveilles !"
Christian Saint-Etienne, économisteà franceinfo
Le gestionnaire du réseau électrique, RTE, fait ses calculs : en ajoutant les nouveaux besoins nés de la stratégie de réindustrialisation à ceux des autres usages (transports, logements), la consommation d’électricité va grimper d’environ 60%, et davantage en 2050, même s'il est possible que cela s'amorce dès 2035.
"Aujourd'hui, ce qui a beaucoup changé, c'est qu'on a des projets concrets. Notre analyse, c'est qu'on est tout à fait en situation de rendre possible cette réindustrialisation et cette électrification", veut croire Thomas Veyrenc, directeur exécutif de RTE. Pour cela, le dirigeant estime qu'il faut "impliquer quatre leviers : l'efficacité, la sobriété, la maximisation de la production des centrales nucléaires actuelles". Selon Thomas Veyrenc, cette dernière "peut être plus disponible qu'aujourd'hui".
Concernant les énergies renouvelables, le directeur exécutif de RTE estime qu'il faut "au minimum un doublement d'ici 2035. À ces conditions-là, toutes les trajectoires passent, y compris les plus hautes".
Les industriels ne partagent pas cette vision assez optimiste
En face, les industriels sont plus dubitatifs. "Aujourd'hui, en regardant les choses très objectivement, on peut considérer que ça ne boucle pas", relativise Nicolas de Warren, président de l'Uniden, l'union des industries utilisatrices d'énergie.
Selon ce dernier, il y aura des choix à faire, "des arbitrages entre la consommation des ménages, de l'industrie. Faut-il, poursuit le dirigeant, confirmer le plan hydrogène, qui requiert des besoins très importants en électricité ? Il faudra très probablement ajuster un peu de tous les côtés en fonction de ces disponibilités d'électricité".
Certains industriels ont d’ailleurs l’idée de moduler leur production en fonction de la disponibilité en électricité : ralentir quand elle est faible, et accélérer quand elle est abondante. Cette production industrielle ne serait alors plus seulement liée au marché, mais aussi au vent et au soleil : une vraie petite révolution, qui reste encore à faire.
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