: Reportage "Si on ne fait rien, il ne restera plus de glace en dessous de 3 800 mètres d'altitude" : en Suisse, l'inquiétude grandit pour les glaciers des Alpes

Depuis la gare d'altitude du Jungfraujoch, à 3 463 mètres d'altitude, la vue est superbe : tout autour à perte de vue, les plus beaux sommets des Alpes. Et juste en face, le glacier d'Aletsch, 80 kilomètres carrés de glace... qui fond (presque) à vue d'œil. "En Suisse, 80% des glaciers vont disparaître, confirme Matthias Hüss, glaciologue à l'ETHZ et directeur du réseau suisse de relevés glaciologiques GLAMOS. Il n'y a aucun moyen de stopper ça. La perte est même plus importante pour le glacier d'Aletsch, parce qu'il réagit lentement. Il lui faut beaucoup de temps pour s'adapter au climat actuel. Mais il est tellement grand et tellement épais que cela va prendre beaucoup de décennies pour le faire disparaître complètement."

Depuis l'an 2000, les glaciers suisses ont lâché 40% de leur volume total. Dont 10% rien qu'entre 2022 et 2023. Un scénario catastrophe qui a surpris même Matthias Hüss et sa collègue Martina Barandun, glaciologue à l'université de Fribourg : "Si on ne fait rien, le glacier va presque disparaître, dit-elle. On sera 500 mètres ou 600 mètres plus bas. Il ne restera plus de glace en dessous de 3 800 mètres d'altitude." La bonne nouvelle, parce qu'il y en a une, c'est que des glaciers ailleurs, peuvent être sauvegardés.

"À l'échelle mondiale, on a de très grands glaciers : en Alaska, en Patagonie, en Asie centrale... Ces glaciers peuvent encore être sauvés, en grande partie. Mais seulement si on agit très vite."

Matthias Hüss, glaciologue

à franceinfo

Il faut pour cela contenir le réchauffement à 1,5-1,9 degrés maximum d'ici 2100. Les mesures prises actuellement par les Etats ne permettent pour le moment que d'espérer +2,7 degrés. Beaucoup trop pour les glaciers des Alpes, qui auront fondu de 89% dans ce cas de figure.