Posidonie en Corse : une algue mal-aimée pourtant essentielle

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Article rédigé par France 2 - T. Souman, S. Guillaumin, C. La Rocca, L. Joueix, A. Etienne - - Édité par l’agence 6Médias
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Les posidonies, des petites herbes séchées qui s'accumulent sur le bord de la Méditerranée sont des plantes marines qui ne plaisent pas aux touristes et qui sont pourtant vitales pour la biodiversité.

Ce texte correspond à une partie de la retranscription du reportage ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour la regarder en intégralité.

Des paysages idylliques de mer turquoise sur cette côte au nord de la Corse. Pourtant, quand les touristes y regardent de plus près, ce n'est pas vraiment dans le sable fin qu'ils mettent les pieds. Les posidonies, ces plantes marines, pas toujours à leur goût. "Les enfants, ils aiment bien faire des châteaux. Ils n'ont pas envie de faire des châteaux de posidonies," déplore une vacancière.

Marteler le rôle des posidonies. C'est la mission que s'est fixée le parc naturel marin du Cap Corse. Même mortes échouées sur la plage, elles abritent des crabes, de petits insectes, toute une vie essentielle, et présentent aussi un intérêt majeur pour l'homme. "C'est une banquette qui est relativement compacte, qui est là depuis des années et qui se forme et qui a un vrai rôle de protection du littoral, parce qu'avec les différents phénomènes météo qu'on peut connaître ces dernières années, cette banquette-là, elle reste et elle protège de l'érosion côtière," détaille Nicolas Tomasi, chargé de mission pour le "Parcu naturale marinu di u Capricorsu è di l'Agriate".

Un impact direct sur les commerces environnants

Pourtant, il y a quelques années, la tension monte d'un cran. Excédés, certains restaurateurs de plages, évacués par leurs propres moyens, s'établissent protégés en toute illégalité. Alors depuis, le parc naturel marin, avec les communes, prend en charge les situations les plus critiques. 130 000 euros ont été investis depuis 5 ans pour étaler, comme ici, les posidonies nitrogénantes, sans mettre à mal leurs fonctions pour l'environnement. Grâce à cette action des posidonies aplaties et mélangées au sable, ce gérant de base nautique a vu des effets concrets : un sol qui tient mieux, des touristes qui reviennent, et sa plage qui regagne du terrain. "L'érosion avait été tellement importante que la plage avait récupéré jusqu'à ce niveau-là. Et depuis une dizaine d'années, elle a gagné 7-8 m avec cette gestion en étalement des posidonies. On voit bien vraiment de là qu'il y a une distance. C'est quand même assez important," confie Mathieu Marfisi, cogérant de base nautique.

Conserver les posidonies, un choix fort. Mais pour cohabiter avec les vacanciers, les équipes du parc naturel marin doivent mieux les faire connaître. Cette tâche, ses agents la prennent très à cœur. Car ces membres de l'OFB, la police de l'environnement, savent à quel point les herbiers de posidonie sont vitaux. Véritables refuges pour poissons et autres espèces sous l'eau, mais aussi puits de carbone qui captent le CO2 puis rejettent de l'oxygène dans la mer. "On appelle ça le poumon de la Méditerranée. On dit qu'elle est plus productive que la forêt tropicale," explique Laurent Ricquiers, chef de service opérations Parc naturel marin Cap Corse et Agriate Français de la Biodiversité.

Des interdictions pour amarrer les bateaux

Depuis quatre ans, interdiction pour les bateaux de plus de 24 m de mouiller trop près des côtes autour du Cap Corse. Les autres, eux, doivent veiller à ne pas abîmer les herbiers avec leur ancre. Laurent Ricquiers repère un navire de 17 m en infraction. Après avoir plongé pour en avoir le cœur net, plus de doute. Pas de sanction cette fois, mais un avertissement et l'obligation de déplacer le bateau. 
Pour les délits les plus graves, les propriétaires de navires risquent jusqu'à 150 000 euros d'amende et deux ans de prison. Très dissuasif. Au point, selon le directeur du port de Saint-Florent, de faire chuter la fréquentation ; les bateaux préfèrent aller en Sardaigne. 

"On est vraiment sur une diminution qui va se situer, je pense, cette saison entre 30 et 40 % pour les plus de 30 mètres. Ce type de clientèle là, ce sont des clientèles qui vont consommer, c'est-à-dire qu'aujourd'hui le port, ce n'est pas seulement un parking à bateaux comme c'est vu, c'est aussi l'objectif d'avoir un rayonnement économique," déplore David Donnini, directeur du port de Saint-Florent. Pour améliorer la situation, les autorités envisagent d'installer des coffres d'amarrage. Ces attaches permettraient à la fois aux bateaux de se garer plus près des côtes et à la biodiversité de se développer à l'intérieur. En parallèle, début des expérimentations : replanter des boutures de posidonie pour tenter de faire renaître en mer une partie des hectares détruits.

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