Réforme des retraites et pénibilité : "A partir de 30 ans, vous êtes déjà tout cabossés", s'alarment les aides-soignants

Après quatre mois de concertations, le "conclave" des retraites s'est finalement soldé par un "échec", lundi soir. Parmi les points-clés : la prise en compte de la pénibilité.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Une patiente reçoit l'aide d'un aide-soignant, dans le couloir d'un pavillon de l'hôpital Sainte-Anne, à Paris. (JOEL SAGET / AFP)
Une patiente reçoit l'aide d'un aide-soignant, dans le couloir d'un pavillon de l'hôpital Sainte-Anne, à Paris. (JOEL SAGET / AFP)

Et maintenant, quid de la réforme des retraites ? Après l'échec du "conclave", lundi 23 juin, les négociations autour de l'âge de départ à 64 ans restent en suspens. L'un des principaux blocages : la réparation de la pénibilité pour certains métiers.

Depuis 2017, les vibrations mécaniques, l'exposition aux risques, mais aussi le port de charges lourdes et les postures pénibles ont ainsi été supprimés de la liste des critères de pénibilité qui permettent de prendre une retraite anticipée.

"En 20 ans, j'ai pris 30 kilos !"

Or, cette prise en compte est notamment réclamée par certaines professions, comme les aides-soignants. Shana, par exemple, a vu sa santé se dégrader après 20 ans de métier : "Depuis 2009, j'ai eu trois hernies discales. En 20 ans, j'ai pris 30 kilos ! J'ai de la tension, d'autres ont développé du diabète... À partir de 30 ans déjà, vous êtes tout cabossés et la retraite est très loin", regrette cette aide-soignante dans une maison de retraite du Val-de-Marne.

Mouvements répétitifs, postures inconfortables... Même s'il existe des appareils pour porter certains résidents, le métier reste très physique. "Il y a des chambres qui ne sont pas aménagées, donc on est obligé de les soulever physiquement, décrit Alicia, qui travaille depuis 22 ans dans un Ehpad, à Noisy-le-Grand, en Seine-Saint-Denis. Si le résident tombe, s'il a un problème ou veut aller aux toilettes, on essaie de faire le maximum pour qu'ils gardent leur autonomie, mais il faut quand même les accompagner. C'est toujours un effort à faire", souffle-t-elle.

"Beaucoup abandonnent"

Résultat : de nombreux aides-soignants jettent l'éponge avant la retraite, déplore Bosco, aide-soignant dans l'Essonne. "Beaucoup de nos camarades abandonnent. A 60 ans, beaucoup sont fatigués, ont mal aux reins, il y a des accidents, des handicaps..." Et le délégué CFDT d'ajouter : "Nous pensons qu'il faut prendre en compte cette pénibilité pour que l'on ait la retraite un peu plus tôt que les autres."

Baisse des effectifs, pathologies des résidents qui s'aggravent... Aujourd'hui, 90% des Ehpad sont en difficulté, selon Force ouvrière. De quoi faire penser à une reconversion pour certains, comme Warda, aide-soignante à Paris depuis vingt ans.

"Même si j'aime mon métier, mon corps me lâche."

Warda, aide-soignante à Paris

à franceinfo

Et Warda de confier à contrecœur : "Qu'est-ce qu'on va faire après ? On ne sait pas, parce que c'est mon premier choix...J'ai choisi mon métier, on ne me l'a pas imposé. Trouver un autre métier, c'est compliqué."

Alicia insiste : avec ces concertations sur les retraites, c'est l'avenir de la profession qui se joue. "Les jeunes maintenant ne veulent plus venir faire ce métier parce qu'ils se rendent compte que c'est difficile. Il faut les inciter à venir : on a besoin d'eux pour s'occuper des personnes âgées. La population est en train de vieillir de plus en plus, on a besoin de jeunes ! C'est important de prendre en compte cette pénibilité", défend-elle. Un métier qui "manque clairement de reconnaissance", glissent ces professionnels.

Commentaires

Connectez-vous ou créez votre espace franceinfo pour commenter.