Wikipédia publie une lettre ouverte pour dénoncer les "menaces" d'un journaliste du "Point"

Wikipédia publie une lettre ouverte intitulée "Non à l'intimidation des contributeurs bénévoles", dévoile France Culture mardi 18 février. L'encyclopédie collaborative en ligne dénonce notamment les "menaces" proférées par un journaliste du magazine Le Point à l'un de ses contributeurs. 

"Nous, bénévoles contribuant à Wikipédia en français, apportons notre plein soutien à notre pair FredD, cible de courriels d'intimidation par un journaliste du magazine Le Point, menaçant de divulguer son identité et sa profession", déclarent au moins 450 signataires de cette lettre ouverte publiée sur le site de l'encyclopédie collaborative mardi.

"Nous allons faire un article sur vous"

Selon les informations de France Culture, un journaliste du Point, Erwan Seznec, a écrit au contributeur "FredD" après avoir constaté des modifications sur la page de l’hebdomadaire. Ces dernières indiquent que le journal a pris un tournant "populiste" et qu'il a une ligne éditoriale de plus en plus proche de la droite identitaire.

"Nous allons faire un article sur vous, sur notre site, en donnant votre identité, votre fonction, en sollicitant une réaction officielle de (l'employeur supposé de FredD)", a écrit Erwan Seznec, relate Wikipédia dans sa lettre ouverte. "Le même journaliste a également obtenu le numéro de téléphone personnel de FredD et l'a contacté par ce biais", ajoute l'encyclopédie collaborative.

Le magazine Le Point défend son journaliste

"Je ne suis pas en train de le menacer", se défend Erwan Seznec, contacté par France Culture à ce sujet. "Je dis juste que 'le ciel est menaçant", précise-t-il. "Quand on en vient à dire que Le Point a une dérive trumpiste trois ans avant Trump, je pense effectivement qu'on est en droit de demander des corrections", estime Erwan Seznec, qui voit dans la description de Wikipédia "du dénigrement" à l'encontre du Point. La direction du magazine, contactée par France Culture, fustige une "suite d'actes malveillants" et juge les sources utilisées, notamment le collectif de chercheurs RogueESR, peu fiables.

La direction du magazine, contactée par France Culture, fustige une "suite d'actes malveillants" et juge les sources utilisées, notamment le collectif de chercheurs RogueESR, peu fiables. Selon Etienne Gernelle, directeur du Point, contacté par France Inter, il n'y a rien de menaçant : "Depuis quand enquêter et faire des articles, c'est faire des menaces ?" . "Ca les embête parce que tous ces gens-là travaillent de manière anonyme. Ils travaillent comme travaillent les trolls sur les réseaux sociaux, en masquant leur identité et en racontant n'importe quoi". Etienne Gernelle estime donc "qu'en fait, on a le pire des réseaux sociaux sur Wikipédia".

"Il aurait pu contester la suffisance de la source."

FredD, un contributeur de Wikipédia

à France Culture

"S'il avait juste utilisé les outils très simples qui sont la page de discussion de l'article pour dire : 'Écoutez, je trouve que la formulation de ce paragraphe n'est pas bonne et que la source est insuffisante', le paragraphe disparaissait dans les dix minutes", certifie le contributeur ciblé par Le Point, actif depuis 18 ans et auteur de plus de 30 000 modifications, selon Wikipédia. "À la place, il m'a directement menacé, mais sans jamais invoquer ces questions éditoriales qui ressortent maintenant."

Dans sa lettre ouverte, Wikipédia critique aussi les méthodes du journaliste du Point : "Les propos tenus dans ces courriels relèvent explicitement de la menace et sont, à ce titre, tout à fait inadmissibles".

"Les désaccords éditoriaux, tout à fait courants sur Wikipédia, se règlent par des débats en page de discussion de l'article concerné, dans le respect des règles de savoir-vivre."

Wikipédia

extrait de la lettre ouverte

L'encyclopédie collaborative souligne aussi le fait qu'Erwan Seznec, qui a publié l'article "Wikipédia, plongée dans la fabrique d’une manipulation" le 13 décembre, avait déjà diffusé des "informations personnelles supposées sur plusieurs autres contributeurs bénévoles". Des procédés "inédits dans la presse française grand public", dénonce la lettre ouverte, qui relèvent du "règlement de comptes ou de l'intimidation".