Fabrice Tourre, collaborateur de la banque américaine Goldman Sachs, doit témoigner mardi devant le Sénat américain
Bouc émissaire ? Ou manipulateur ? C'est la question qui soutend l'audition de Fabrice Touré, jeune Français de 31 ans.Il est le seul collaborateur de Goldman Sachs dont le nom figure dans la plainte de la Securities and Exchange Commission (SEC).
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Bouc émissaire ? Ou manipulateur ? C'est la question qui soutend l'audition de Fabrice Touré, jeune Français de 31 ans.
Il est le seul collaborateur de Goldman Sachs dont le nom figure dans la plainte de la Securities and Exchange Commission (SEC).
Et ce qu'il dira aux sénateurs américains pourrait bien avoir des conséquences durables aussi bien sur l'avenir de Goldman Sachs que sur les débats du Congrès sur les projets de réforme du secteur financier.
Les faits reprochés
Goldman Sachs et Fabrice Tourre, vice-président de la banque d'affaires new-yorkaise, sont accusés d'avoir fait "des déclarations trompeuses et passé sous silence des faits essentiels sur certains produits financiers liés aux prêts subprimes au moment où le marché de l'immobilier résidentiel américain commençait à chuter".
La plainte de la SEC désigne le Français Fabrice Tourre comme le principal responsable de cette manoeuvre, qui remonte à avril 2007, juste avant l'éclatement de la crise des subprimes.
La banque aurait caché le fait qu'un de ses importants clients, le fonds d'investissement Paulson, avait poussé à la création d'un produit financier au moment même où ce fonds prenait des positions pariant sur la chute du marché immobilier.
Concrètement, la SEC affirme que Goldman a structuré et vendu un CDO ("collateralized debt obligations") synthétique, lié à la performance de titres adossés à des prêts d'immobilier résidentiel (RMBS), qui a fait perdre plus d'un milliard de dollars à des investisseurs. Elle reproche à la banque de ne pas avoir communiqué aux investisseurs des "informations vitales" sur ce CDO, dénommé Abacus.
Parmi ces informations figurait le fait qu'un important gestionnaire de "hedge funds", Paulson & Co, était impliqué dans le choix des titres inclus dans le portefeuille du CDO et qu'il avait lui-même pris une position de vente à découvert sur le CDO, misant ainsi sur la baisse de sa valeur. Selon la plainte de la SEC, Paulson & Co a versé 15 millions de dollars à Goldman Sachs pour concevoir la structure du CDO, clos le 26 avril 2007. Un peu plus de neuf mois, 99% du portefeuille avait été dégradé, précise la SEC.
"C'est très grave. Cela montre qu'ils ont parié contre leurs clients", a observé Gregori Volokhine, de Meeschaert New York qui estime que cela "pourrait coûter très cher à la banque", si les acheteurs du produit en question devaient se retourner contre la banque et demander compensation. Les investisseurs auraient perdu au total plus d'un milliard de dollars dans l'aventure.
Qui est Fabrice Tourre ?
Fabrice Tourre est un pur produit des "grandes écoles" françaises. Centralien, amateur de football, il a la réputation de travailler dur. "Quand ils entrent à Centrale, les gens ont plutôt tendance à lever le pied de l'accélérateur. Pas Fabrice Tourre", se souvient un de ses amis.
Au cours de ses études, Fabrice Tourre est aussi passé parle prestigieux lycée Louis-le-Grand.
"Fabulous Fab", surnom que se donnait lui-même Fabrice Touré, est décrit par ses amis comme un garçon pudique et appliqué. On dit aussi de lui qu'il sortait rarement la nuit et qu'il n'était pas sûr de vouloir rejoindre le monde de la finance.
Reste que comme le montre pourtant sa correspondance avec sa petite amie, Fabrice Tourre avait parfaitement conscience des effets dévastateurs que pouvaient causer les produits structurés qu'il concevait.
Des courriels remontant à 2007 et rendus publics ces derniers jours, certains par Goldman Sachs et d'autres par la SEC, montrent en effet un jeune homme alors âgé de 28 ans, alternant, tantôt en français tantôt en anglais, déclarations amoureuses et réflexions sur les prêts immobiliers "subprime", autour desquels étaient structurés ses produits.
Dans ces écrits, il se montrait critique envers les produits financiers qu'il concevait lui-même, n'hésitant pas à les qualifier de "pure masturbation intellectuelle" et de "quelque chose d'absolument conceptuel et de hautement théorique".
"C'est comme Frankenstein qui se retourne contre son propre inventeur", a-t-il encore écrit à propos des produits financiers qu'il proposait aux investisseurs.
Et après Goldman Sachs ?
La SEC a laissé entendre que d'autres banques que Goldman Sachs pourraient être poursuivies par les autorités américaines pour fraude sur des produits financiers liés aux subprimes.
"Nous continuons à examiner les produits (d'investissement) structurés", s'est borné à indiquer il y a quelques jours Robert Khuzami, un responsable de la SEC, en réponse à une question de la presse sur la Deutsche Bank. La banque allemande se retrouve en effet victime d'accusations semblables à celles de Goldman Sachs. Il a indiqué que la SEC poursuivait son enquête.
Juste après l'annonce des poursuites contre Goldman, l'action Deutsche Bank avait brusquement perdu 4,95% à 57,40 euros.
Infographie animée: L'affaire Goldman Sachs, de la vente des subprimes à l'enquête.
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