Budget 2026 : "Le socle commun et le RN s'entendent pour refuser toutes les mesures de justice fiscale", accuse Éric Coquerel, Président de la commission des finances de l'Assemblée nationale

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Article rédigé par France 2 - Édité par l'agence 6médias
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Éric Coquerel, député LFI et Président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, était l'invité des 4 Vérités, mardi 21 octobre, pour dresser le bilan de la première journée d'examen du budget 2026 par sa commission.

Ce texte correspond à la retranscription d'une partie de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour regarder l'entretien en intégralité.


Gilles Bornstein : Avant de parler de l'examen du budget par votre commission, parlons de l'incarcération de Nicolas Sarkozy qui rentre en prison dans quelques instants. Au même moment, ses proches manifestent. Qu'est-ce qui vous choque le plus ? L'incarcération d'un ancien président de la République ou le fait que des gens manifestent pour le soutenir ?

Éric Coquerel : Ce qui me choque, c'est qu'on ait besoin d'incarcérer un président de la République. Ce sont les faits qui sont d'une extrême gravité. Je vous rappelle que les juges ne font qu'appliquer la loi. Nous, nous n'avons jamais été favorables à tout ce qui est exécution provisoire, mandat de dépôt différé, avant-appel, etc. Nous ne sommes pas pour le "tout en prison" très rapidement. Mais il se trouve que M. Sarkozy, les siens, la droite, l'extrême droite ont toujours voté dans ce sens. Donc, il est normal que s'applique à eux ce qu'ils ont réclamé pour tout le monde et qui s'applique à 86 % des cas de personnes qui ont cinq ans de prison.

Mais le fait que quelqu'un qui est présumé innocent dorme en prison, vous n'êtes pas très à l'aise avec ça ?

Nous, nous l'avons dit. Nous pensons qu'on doit respecter les droits de la défense et que, quand on peut, c'est-à-dire quand il n'y a pas de menace pour la société, l'exécution provisoire, nous ne sommes pas pour.

Et là, il y a eu une menace pour la société ?

J'ai fait ma réponse. Mais il y a plein de gens qui ne sont pas une menace pour la société et qui se retrouvent, je vous le dis, en prison, très rapidement, du fait même du durcissement des lois pénales. Les juges ne font qu'appliquer la loi pénale, qui a été votée, et notamment, votée par les amis de M. Sarkozy, votée par les amis de Mme Le Pen, etc. Encore une fois, il faut qu'ils se regardent dans la glace par rapport à ce qu'ils votent. Maintenant, ils s'aperçoivent d'un coup qu'eux aussi sont concernés. Quelle belle affaire ! Mais il fallait peut-être s'en apercevoir avant, parce qu'il y a plein de gens qui sont dans cette situation.

Le procureur général près de la Cour de cassation, qui est le plus haut magistrat de France, vient de dire en parlant de l'éventuelle visite de Gérald Darmanin à Nicolas Sarkozy en prison que cela portait atteinte à l'indépendance des magistrats. Quel est, pour vous, le rôle de Gérald Darmanin en tant que visiteur de son ami ?

Comme cela a été dit, c'est inédit. J'ai lu des sondages sur la manière dont les gens voient les partis politiques et les responsables politiques. Moi, cela me semble en partie injuste. Ils nous mettent tous dans le même sac quand il y a des choses comme ça, mais comment voulez-vous que les gens nous voient autrement à partir du moment où il y a deux poids, deux mesures ? C'est-à-dire, que quelqu'un qui se retrouve en prison pour des faits graves reçoive la visite du garde des Sceaux, puisse aller voir Emmanuel Macron, etc. Je pense que tout cela participe à une remise en question de l'autorité judiciaire. Je ne vois pas pourquoi Nicolas Sarkozy aurait droit à plus d'égards par rapport aux faits qui lui sont reprochés et le fait encore que c'est la loi qui est appliquée. Je crois que M. Darmanin était pour le fait de durcir l'exécution provisoire. Pourquoi aurait-il plus d'égards que n'importe quel concitoyen français ? Il y a vraiment quelque chose qui n'est pas acceptable et je vous assure que c'est difficilement supportable et entendable par les gens qui nous regardent.

Venons-en à l'examen du budget par la commission que vous présidez. Vous avez achevé lundi 20 octobre votre première journée d'examen. La taxe Zucman, défendue par la gauche unie, tous les groupes de gauche l'ont défendue, a été discutée, examinée puis rejetée. N'est-ce pas la preuve qu'il n'y a pas de majorité pour la taxe Zucman à l'Assemblée ?

C'est la preuve que cette année, vous avez un socle commun et le RN qui s'entendent pour refuser toutes les mesures de justice fiscale.

Vous avez présenté un amendement qui a été adopté grâce au RN.

La plupart des amendements que nous proposons : le rétablissement de l'ISF, le fait d'en finir ou au moins de remonter le plafond du bouclier social du capital qui est la flat tax, c'est-à-dire de ne pas pouvoir être imposé à plus de 30 %... Tout cela a été enlevé. Pire, même la contribution sur les grandes entreprises, qui s'avère déjà être un faible apport, si on considère tous les efforts qui sont demandés aux Français, a été là aussi diminuée par la même alliance. Le Rassemblement national et socle commun. Voilà à quoi nous avons affaire depuis hier. Vous avez raison, il y a une mesure que j'ai réussi à sauver sur l'impôt différencié qui permet d'aller chercher les évadés fiscaux. Mais à part ça, je vous assure qu'il y a plutôt un durcissement des mesures qui ont été adoptées en faveur d'une moindre justice fiscale et tout ce qu'on a proposé dans ce sens a été balayé. Voilà pour l'instant le bilan que j'en tire.


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