Baisse annoncée du budget de la recherche : "C'est quelque chose d'irréversible", alerte la directrice générale de l'Institut Pasteur

"La recherche ne devrait pas être sujette à des fluctuations politiques", s'insurge Yasmine Belkaid alors que le budget de la recherche va subir des coupes importantes. Rappelant la récente crise du Covid, elle pointe qu'on se rend ainsi "extrêmement vulnérables".

Article rédigé par franceinfo
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"C’est à se demander si on apprend des leçons de l’histoire, et même d’une histoire très récente", questionne mercredi 22 janvier sur franceinfo Yasmine Belkaid, directrice générale de l’Institut Pasteur, faisant référence à l’épidémie de Covid en 2020 et alors que le budget de la recherche et de l’enseignement supérieur doit diminuer de 630 millions d’euros dans le projet de loi de finances 2025 (il était de près de 27 milliards en 2024).

"Dix ans avant l’épidémie, le gouvernement avait investi moins de 28% en recherche biomédicale", rappelle-t-elle. Avec la baisse annoncée du budget pour la recherche, "on est en train de reproduire une chose similaire. Si on diminue les investissements [malgré l’augmentation des maladies infectieuses], on se rend extrêmement vulnérables et dépendants d’autres environnements pour trouver les solutions de demain", détaille Yasmine Belkaid.

Les États-Unis investissent en continu dans la recherche depuis 60 ans

"Couper [ce budget] c’est quelque chose d’irréversible, prévient-elle, car c’est un investissement sur le long terme". Elle détaille le parcours pour qu’un scientifique soit au niveau : "Pour qu’un scientifique devienne un scientifique, c’est 20 ans d’investissements". La directrice générale de l’Institut Pasteur explique que 17% de son budget provient des subventions de l’État. Une baisse de ces moyens, "ça a un impact direct sur les travaux de tous nos chercheurs, et ça impacte tout l’écosystème français" de la recherche, citant Pasteur, mais aussi l’Inserm ou l’APHP. "La recherche ne devrait pas être sujette à des fluctuations politiques. Elle appartient à la société et doit être protégée sur le long terme", réclame-t-elle. De façon générale, Yasmine Belkaid déplore le manque chronique d’investissement pour la recherche dans le pays : "La France, des pays à haut niveau économique, est peut-être le pays qui investit le moins en recherche."

Questionnée sur la réussite de la recherche aux États-Unis, Yasmine Belkaid note des différences entre les deux pays. Aux États-Unis, "il y a eu une continuité d’investissement dans la recherche […] depuis 60 ans. […] Ce que l’on voit aujourd’hui, c’est le produit d’investissement", alors que le vaccin contre le Covid a été découvert conjointement par les Américains et les Allemands. La directrice générale de l’Institut Pasteur pointe une deuxième différence : "C’est une relation avec le risque très différente. [Aux États-Unis], on tente des choses. En France, il y a plus de peur, plus d’anxiété et moins de valorisation du risque", conclut-elle.

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