Pourquoi les PSA d'Aulnay ne brûlent pas des pneus
A l'usine PSA d'Aulnay-sous-Bois, dont la fermeture a été annoncée jeudi 12 juillet, la mobilisation sociale s'annonce sous de mauvais auspices.
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Cette fois, c'est sûr : l'usine PSA d'Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) ferme. Au moins 10 000 emplois sont concernés, directement ou non. Pourtant, après l'annonce, jeudi 12 juillet, l'affaire semblait pliée pour beaucoup de salariés. La mobilisation sociale ne semble pas à l'ordre du jour.
• Un timing bien maîtrisé
"Il y a une espèce de préparation qui a fait son travail, explique Olivier Cousin, professeur de sociologie à l'Université Bordeaux II. L'annonce est violente mais ce n'est pas brutal, ce n'est pas soudain, il n'y a pas de brutalité dans la manière."
Et pour cause : depuis un an, la rumeur couve. En juin 2011, la CGT fait circuler un document interne dans lequel la fermeture du site est évoquée. La direction dément. Mais l'idée de "fermeture" reste à l'esprit des salariés, entretenue par les mauvaises nouvelles distillées par la direction. Environ un mois avant l'annonce, le 6 juin, dans un communiqué de presse, repris par Les Echos, PSA dressait un état des lieux catastrophiques de sa production : les ventes de véhicules sont en recul de 10,7%, indiquait t-elle.
De plus, l'annonce intervient mi-juillet. La date n'a pas été choisie au hasard : l'usine s'arrête quatre semaines en août, plus une semaine de chômage imposé. Dans deux semaines, les salariés ne seront plus au travail. La CGT martèle qu'ils reviendront en septembre, prêts à la mobilisation. Mais comme l'explique Irène Pereira, co-fondatrice de l'Iresmo (Institut de recherche sur le syndicalisme et les mouvements sociaux) : "La mobilisation est toujours plus facile sous le coup de l’émotion : la colère, la peur. Attendre, c’est prendre le risque que l’émotion s’émousse."
• Des salariés démobilisés
Dans l'usine PSA Aulnay, moins de 15% des salariés sont syndiqués. Ce qui est plus que la moyenne nationale mais inférieur au taux de syndicalisation moyen dans le secteur de l'automobile. “Ici, c’est toujours super dur de mobiliser”, rapporte un salarié d'Aulnay dans Libération.
"Beaucoup ne veulent pas arrêter le travail", explique dans le quotidien Tanja Sussest, déléguée du Syndicat indépendant de l'automobile (SIA). "On n'a plus le moral, on est fatigués. Après tous les efforts qu’on a fait en termes d’effectifs, de compétitivité et de compactage des structures, c’est un gros coup de massue", souligne un collègue, David Ruelland.
Résignés mais pas tout à fait perdus, pour la sociologue, "la réaction des salariés d'Aulnay est classique". "L’inverse, une mobilisation intense, immédiate, tient du miracle social."
• Des syndicats favorables à la méthode douce
Brûler des pneus, lancer une grève générale... Très peu pour eux. Les syndicats majoritaires, la CGT en tête, proposent plutôt de mettre en place un "comité de lutte" pour définir des actions en septembre, en prenant en compte le point de vue "de tout le monde et pas seulement des syndicats". Sur le papier, pas de quoi galvaniser les foules. Mais c'est le seul moyen de mobiliser large. "Il faut être 2 500 pour peser dans une mobilisation. Et beaucoup ici ne veulent pas arrêter le travail, il faut donc mettre en place d’autres solutions que la grève", précise le Syndicat indépendant de l'automobile dans Libération.
Quoi faire, comment, avec qui ? "La mobilisation a besoin de temps pour s'accorder, s'organiser", explique Olivier Cousin. Pour mobiliser et stabiliser un mouvement, les motifs de colère, les sentiments d'injustice doivent être pensés et cadrés. La sociologue Irène Pereira ajoute : "L'usage du comité de lutte peut aussi être la marque qu'une mobilisation radicale risque de se préparer car cela signifie qu'il y a au sein des syndicats des militants assez radicaux."
Dernier élément en faveur de la méthode douce. Avant, par exemple, de s'attaquer à la sous-préfecture comme l'ont fait les "conti", les salariés attendent le résultat du bras de fer entre le nouveau gouvernement socialiste et PSA. D'autant que Philippe Varin, le président du Directoire leur a promis un dialogue social "exemplaire."
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