: Reportage Comment l'IA a aidé à écrire une pièce imaginaire de Molière, bientôt jouée sur scène
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Une troupe de théâtre de Sorbonne Université, à Paris, a collaboré avec un collectif d'artistes pour créer une comédie dans le pur style de Molière, avec l'aide de l'intelligence artificielle. Une première représentation doit avoir lieu en mai 2026 au château de Versailles.
Peut-on imaginer une comédie qu'aurait pu écrire Molière s'il n'était pas mort en 1673 ? C'est le point de départ d'une idée née à Sorbonne Université en 2023 : créer avec l'aide de l'intelligence artificielle une pièce de théâtre qui aurait pu être signée du célèbre dramaturge. Un extrait de la pièce, L'Astrologue ou les faux présages, a été joué mardi 7 octobre à Paris.
A priori, tous les oppose. D'un côté, le Théâtre Molière Sorbonne, qui revisite des pièces du XVIIe siècle dans les conditions de l'époque. De l'autre, le collectif d'artistes Obvious, qui mène des recherches sur l'IA au sein de l'université. L'idée émerge de les faire travailler ensemble pour expérimenter autour du spectacle vivant. "On a la chance d'avoir Georges Forestier, créateur du Théâtre Molière Sorbonne, qui a écrit la génétique de Molière, raconte Pierre Fautrel, cofondateur du collectif Obvious. Cette génétique décrit, pas à pas, le processus créatif. Nous, on a décomposé ce processus créatif en essayant de voir où est-ce que cela aurait du sens de mettre des algorithmes et des experts humains."
C'est le fil rouge du projet "Molière Ex Machina" : reconstituer l'univers du dramaturge en collant au maximum à la réalité historique. Mais que ce soit sur les textes, le décor, la musique ou les costumes, pour générer des résultats crédibles, le principe est un peu le même : il faut d'abord alimenter l'IA de manière pertinente. Pour la partie rédactionnelle, le collectif a choisi d'utiliser Le Chat, le robot conversationnel du français Mistral AI, et l'a nourri avec des documents historiques, les pièces originales de Molière ainsi que des livres de sa collection personnelle.
Allers-retours nombreux entre IA et spécialistes
Pour tout le reste, il a fallu jongler avec différents modèles d'IA, parfois plus spécialisés et moins connus du grand public. "Prenons l'exemple des costumes, poursuit Pierre Fautrel. On va parler avec les experts du Théâtre Molière Sorbonne pour voir quels sont les documents qu'on va devoir donner à la costumière. Donc on regarde qui était la personne qui faisait les costumes à l'époque : Henri de Gissey. On doit donc rassembler ses différents dessins de costumes pour pouvoir les donner à l'algorithme. Il n'y en a pas tant que ça, une cinquantaine."
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Mais le travail humain ne fait que commencer. Les textes et les images générés par l'IA sont scrutés et en partie retravaillés par des relecteurs, notamment des spécialistes du XVIIe siècle, avant d'être à nouveau réinjectés dans l'IA, toujours sous forme de "prompts", ces requêtes plus ou moins fournies. Des allers-retours nombreux nécessaires pour affiner le rendu, par exemple sur l'humour propre à Molière.
"Les pastiches sont souvent kitsch, estime Mickaël Bouffard, historien de l'art et metteur en scène de la pièce au Théâtre Molière Sorbonne. Et je pense que nous-mêmes, on n'est pas à l'abri du mauvais goût dans cette création. C'est pour ça que l'intelligence artificielle est un filtre, c'est-à-dire qu'elle n'a pas de bon goût ni de mauvais goût, elle travaille objectivement avec ce qu'on lui donne, sa subjectivité est limitée à sa nourriture textuelle."
"Les idées qu'on trouvait bonnes étaient parfois moins bonnes que ce que l'IA pouvait proposer. Pas du premier coup, mais peut-être du vingtième coup. À un moment, il y a une idée géniale qui se dégage."
Mickaël Bouffard, historien de l'art et metteur en scène de la pièceà franceinfo
Pour autant, pas question de sacrifier son esprit critique dans le processus de création avec l'IA, nuance Pierre Fautrel. "C'est un outil fantastique, il permet de faire de nouvelles choses que l'on pense intéressantes, il n'est pas que dystopique et ne fait pas que remplacer des gens, rappelle-t-il. Mais si on veut faire cela de manière correcte, alors il faut se poser les bonnes questions, s'entourer correctement, mettre les moyens de ses ambitions. C'est ce qu'on essaie de démontrer par l'exemple dans ce projet 'Molière Ex Machina'." L'œuvre qui en émerge, L'Astrologue ou les faux présages, est présentée comme une critique de la crédulité humaine, comme un clin d'œil à notre époque sur la place de l'intelligence artificielle.
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