"Le Menteur" au théâtre de La Scala : les tribulations parisiennes d'un mythomane multirécidiviste

Marion Bierry revisite avec beaucoup de bonheur le chef-d'œuvre de Pierre Corneille. "Le Menteur", une pièce jubilatoire, loufoque et burlesque, portée par un Alexandre Bierry impressionnant de présence.

Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
Alexandre Bierry et Benjamin Boyer dans "Le Menteur" de Corneille, au théâtre de La Scala, à Paris. (PASCAL GELY)
Alexandre Bierry et Benjamin Boyer dans "Le Menteur" de Corneille, au théâtre de La Scala, à Paris. (PASCAL GELY)

Dorante a le verbe facile et le mensonge aisé. Arrivé depuis peu à Paris, le jeune étudiant rêve de conquêtes. Poitiers est bien loin. Accompagné de son valet, Cliton, il rencontre deux coquettes aux Tuileries. Comment séduire deux Parisiennes quand on a un passé sans aspérités et peu d'ambition ? Aucune raison de s'inquiéter. Dans la pièce Le Menteur, à La Scala jusqu'au 7 avril, Dorante embellit le réel, invente une réalité alternative dans laquelle il est toujours un héros incroyable à qui il arrive des aventures encore plus incroyables.

Il est à la fois mythomane et mégalomane : il narre des faits imaginaires qu'il présente comme réels et s'attribue bien sûr un rôle flatteur, il est la définition même de ces mots dans le dictionnaire. Comment noyer un mensonge ? En y rajoutant un autre, puis un autre… À l'infini et au-delà.

Quelle vérité ?

Mentir, donc. Dorante ment à tout le monde, à son père, à son ami, à son valet et à ses amoureuses au risque d'oublier ses propres divagations. Il s'invente une carrière militaire éblouissante pendant la guerre de Trente Ans, revendique l'organisation d'une magnifique fête sur l'eau et une bataille rocambolesque pour son honneur. Dorante, incarné par Alexandre Bierry, débite ses mensonges comme s'il était pris dans une urgence absolue sans se douter des conséquences. Ce joyeux chaos est servi par une distribution équilibrée. Pour donner la réplique à Alexandre Bierry dans cet imbroglio frénétique : Benjamin Boyer, Marion Lahmer, Stéphane Bierry, Mathilde Riey et Balthazar Gouzou.

Alexandre Bierry est impressionnant de présence physique et de puissance vocale dans le rôle-titre du chef-d'œuvre de Corneille. Il excelle dans le jeu et dans le chant, avec une palette d'une grande richesse. L'adaptation de Marion Bierry, qui signe aussi la mise en scène, tout en finesse et légèreté, donne à la pièce Le Menteur un air délicieusement désuet et intemporel.

Le registre burlesque, avec les mouvements raides et saccadés d'Alexandre Bierry ou de ses comparses à la recherche des uns et des autres, accentue le rythme enlevé de la pièce. À vous donner le tournis. Et les rires du public, composé de nombreux lycéens le mardi 3 février, cadencent ce spectacle frais et désopilant d'une heure trente.

La version de Marion Bierry a aussi le mérite de nous rappeler qu'avant de devenir un immense dramaturge, Pierre Corneille était un auteur de comédies mordantes comme L'Illusion comique (1636) et Le Menteur (1644). À la grande joie des spectateurs, y compris les plus jeunes.

La fiche

Auteur : Pierre Corneille
Durée : 1h35
Adaptation et mise en scène : Marion Bierry
Distribution : Alexandre Bierry, Stéphane Bierry, Benjamin Boyer, Marion Lahmer, Mathilde Riey et Balthazar Gouzou
Scénographie : Nicolas Sire
Costumes : Virginie H. assistée de Laura Cheneau
Lumières : Laurent Castaingt
Dates : jusqu'au 7 avril 2025
Lieu : La Scala, 13 boulevard de Strasbourg, 75010 Paris

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