"Il avait besoin de s'asseoir 30 secondes, il s'est assis vingt ans" : comment cette réplique de "Bref 2" résonne avec la vie de nombreux téléspectateurs
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Dans la suite de la série culte de Kyan Khojandi, cette phrase évoque la lente reconstruction du personnage incarné par Jean-Paul Rouve, après une rupture amoureuse. Des internautes s'en sont saisis pour exprimer d'autres regrets ou frustrations.
"En pleine crise existentielle devant 'Bref 2'." Face caméra, une jeune femme apparaît les yeux rougis, qu'elle tapote avec un mouchoir. Utilisatrice de TikTok, Amira se filme lors du visionnage de la série à succès portée par Kyan Khojandi, diffusée sur la plateforme Disney+ depuis le 14 février. Dans cette vidéo de quelques secondes, elle mentionne une réplique concernant Jean-Jacques, incarné par Jean-Paul Rouve, qui semble l'avoir touchée : "Il avait besoin de s'asseoir 30 secondes, il s'est assis vingt ans".
Amira n'est pas la seule à se montrer troublée par cette phrase (et la série en général). "Je refuse que ça m'arrive, mais si la maladie de la procrastination continue de me suivre, c'est ce qu'il va se passer", abonde une autre internaute sur l'application chinoise.
Depuis la sortie de la série, on dénombre sur TikTok, Instagram et X, des milliers de publications en référence à cette réplique. Les auteurs de ces posts se décrivent bouleversés, mais aussi désireux de ne plus laisser le temps décider à leur place.
Ils sont pour l'essentiel de jeunes adultes dans la vingtaine, voire la trentaine. Donc plus jeunes que "Je", le personnage principal, un quadragénaire égocentré et paumé, sans travail ni relation amoureuse stable, qui tente de trouver son chemin dans la vie. Bien moins âgés aussi que Jean-Jacques, qui frise la soixantaine et vit reclus dans son appartement depuis que son ex-compagne l'a quitté en 1998, lorsque la France est devenue pour la première fois championne du monde de football. Bref, le temps a passé, mais Jean-Jacques n'a pas bougé.
"C'est un personnage triste et mélancolique, qui montre l'immobilisme et la solitude dans lesquels l'être humain peut rester enfermé", analyse Michaël Stora, psychologue et psychanalyste. Jean-Jacques et cette réplique, déjà culte dans l'épisode 1, provoquent un effet cathartique chez les téléspectateurs. "Personne n'a envie de se laisser aller jusqu'à ce type de situation. C'est plutôt sain, car en faisant le choix inverse de Jean-Jacques, on se positionne du côté de la vie", souligne Michaël Stora. Un contre-exemple dont souhaitent se servir de nombreux fans de la série pour sortir de leur zone de confort.
"A force d'avoir peur, je n'avance pas"
Simon, 34 ans, ne s'est pas reconnu dans le chaos amoureux de Jean-Jacques, mais il l'a transposé sur un autre pan de sa vie. Sur X, il écrit, accompagné d'un émoji ordinateur et d'un autre représentant une mallette de travail : "Il avait besoin de s'asseoir 30 secondes, il s'est assis 20 ans. Il est peut-être temps de se relever". "Ça fait bien longtemps que j'ai mis mes ambitions professionnelles de côté. Je ne me suis pas arrêté 20 ans, mais bien 10-15 ans", explique au téléphone cet habitant du Pas-de-Calais.
Après un master en management et gestion dans le sport, cela a été la douche froide : il avait les savoirs, mais pas le réseau pour trouver le job de ses rêves. "Depuis, je me suis dirigé vers des emplois que j'aurais pu avoir sans ces études, j'ai pris ça comme un échec et choisi de ne pas rebondir", expose ce père de famille, qui travaille actuellement à la Sécurité sociale. S'il a entamé un projet de reconversion ces derniers mois, il rapporte avoir été tiraillé par "les doutes" et avoir peu avancé. Bref 2 l'a convaincu de se "bouger" sans se poser trop de questions.
"J'ai pris un coup de pied aux fesses."
Simon, 34 ansà franceinfo
"Ça fait trois jours que j'ai entendu cette phrase, mais elle me hante encore", a de son côté glissé sur X Isaac, 20 ans, étudiant à la Sorbonne, à Paris. Comme Simon, il constate qu'à "trop réfléchir, on finit par passer à côté des vraies choses". Et se confie : "Cela fait deux ans et demi que je me sens obligé de m'immobiliser un mois avant chaque période de partiels. Je ne bosse pas beaucoup plus avec ce mode de fonctionnement, mais je m'interdis quand même de voir des amis ou d'avoir des loisirs par peur de culpabiliser. Au point que même à Noël, chez ma famille, je ne profite de rien." Depuis le visionnage de la série, Isaac affirme vouloir essayer de se libérer de ses "blocages".
Lisa, elle aussi, a été touchée par ce personnage à l'arrêt depuis trop longtemps. Sur Instagram, la jeune femme a publié une vidéo dans laquelle elle déclare : "J'ai déjà bientôt 25 ans et j'ai toujours peur de perdre mon temps. Mais à force d'avoir peur, je n'avance pas, je n'essaye pas et je compte mes échecs en boucle. Bref, en fait, je perds déjà mon temps (...) Je ne veux plus être cette fille qui a peur (...) Parce que dans 20 ans, je veux avoir des choses à raconter".
Chanteuse à Paris, elle gagne déjà sa vie grâce à des prestations pour des marques, des cabarets et des mariages. Mais Lisa ne vit pas de ses propres chansons. "C'est un milieu compliqué, j'ai souvent eu peur d'essayer et d'y aller au culot, détaille au bout du fil la jeune femme. J'ai compris qu'il fallait que j'arrête de dire non avant même d'avoir essayé."
Dans Bref 2, elle a aussi été émue par la chanson de Régine, Je survivrai (version française du tube de Gloria Gaynor), qui évoque la rupture et accompagne la formule de Jean-Jacques. "Au-delà du travail, cela m'a rappelé que je n'ai plus envie de perdre mon temps à cause de personnes qui m'ont gâché la vie", en amour comme en amitié, glisse Lisa.
"C'est normal d'être en construction"
Pour d'autres internautes, cette réplique ne doit cependant pas être interprétée comme une incitation au mouvement permanent. "'Il avait besoin de s'asseoir 30 secondes, il s'est assis 20 ans' m'agace au plus haut point. On a la vingtaine, arrêtez de stresser les gens ? C'est normal de ne pas encore s'être trouvé sur tous les plans et d'être en construction de sa vie", note une utilisatrice de X. Invité par Hugo Décrypte, Kyan Khojandi a également commenté la réplique.
"Dans notre société, on est pas mal nourris de pression, on est beaucoup entourés de 'il faut' (...) On est dans une société où l'on glorifie le succès et moins le chemin."
Kyan Khojandià Hugo Décrypte
Car la force du message renvoyé par Jean-Jacques peut aussi être celle-ci : il n'est jamais trop tard pour reprendre sa vie en main. Au fil des épisodes, le personnage revit d'ailleurs au contact de "Je". "Il comprend les choses tardivement, certes, mais il les comprend quand même et décide de se bouger. C'est rassurant de se dire qu'on a aussi le droit de prendre du temps avant de tout comprendre à la vie", abonde Lisa.
"Il est évidemment acceptable de s'autoriser des moments de flottement. La clé, c'est de ne pas s'y complaire", ajoute Mickaël Stora. Selon lui, la série, de manière générale, réinterroge la capacité de l'être humain à "supporter l'échec". Mais comme le dit "Je" dans le premier épisode, être heureux, c'est avant tout "faire des choix".
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