"Rick Owens. Temple of Love" : pourquoi il ne faut pas rater l'exposition consacrée au créateur de mode avant-gardiste
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Rick Owens, directeur artistique de son exposition, a imaginé avec le Palais Galliera un parcours qui s'étend à la façade et au jardin du musée de la mode de la ville de Paris. Impressionnant et unique.
Le Palais Galliera présente Rick Owens. Temple of Love, jusqu'au 4 janvier 2026, la première exposition à Paris dédiée au créateur de mode pour une traversée de l'œuvre de cet avant-gardiste, sur la totalité de sa carrière, de ses débuts à Los Angeles à ses collections les plus récentes. Intitulée Temple of Love, elle livre toutes les clés pour comprendre les origines du style si particulier du créateur, qui a présenté, jeudi 26 juin, sa collection printemps-été 2026 lors de la semaine de la mode masculine de Paris.
Cent silhouettes, des archives personnelles, des vidéos et des installations inédites, ainsi que des œuvres de Gustave Moreau, Joseph Beuys et Steven Parrino, permettent de revenir sur les sources d'inspiration de ce créateur américain très en phase avec la société. Le parcours évoque aussi l'importance de son épouse Michèle Lamy.
"Les vêtements que je crée sont mon autobiographie, c'est l'élégance calme à laquelle j'aspire et les dégâts que j'ai causés en chemin, ils sont l'expression d'une tendresse et d'un égo déchainé. Ils sont une idéalisation adolescente et sa défaite inévitable."
Rick Owens
Fasciné par le sacré, Rick Owens dévoile les références multiples de ses créations, de Joris-Karl Huysmans à l'art moderne et contemporain, en passant par les films hollywoodiens du début du XXe siècle. L'exposition propose une réflexion sur l'amour, la beauté et la différence à travers une mise en scène monumentale, qui ne peut laisser indifférent.
Dans la première salle, entièrement tendue de feutre de laine marron, aux dimensions gigantesques, une cinquantaine de mannequins, installés en hauteur, illustre son travail à Hollywood, aux États-Unis. La deuxième salle, où la lumière du jardin rentre à flots par les grandes baies vitrées, aborde sur 9 podiums ses collections depuis son arrivée à Paris en 2003 lorsqu'il décide de s'installer dans la capitale française jusqu'à aujourd'hui. De chaque côté de celle-ci, deux salles plus petites : l'une, nommée La Joie de la décadence et interdite aux moins de 18 ans, dévoile son intimité. L'autre recrée la chambre et la garde-robe de Rick Owens et de Michèle Lamy dans leur studio à Los Angeles.
Parce que c'est un créateur transgressif et singulier
Né en Californie en 1961, Rick Owens débute à Los Angeles comme patronnier avant de lancer sa griffe en 1992. "Il ne va pas faire une école de mode, mais une école de patronage industriel, une école technique : il va apprendre la mode non pas par le dessin, mais par la structure même du vêtement. C'est un point très important pour comprendre son œuvre, il passe par le modelé du vêtement. Sa manière de concevoir le vêtement est celle de couturiers illustres comme Madame Grès ou Monsieur Balenciaga", indique Alexandre Samson, responsable des collections contemporaines du musée et commissaire de l'événement.
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Ses tenues, inspirées des cultures underground et du glamour de la mode des années 1930, se démarquent par leurs structures sophistiquées. Ses ressources limitées le poussent à récupérer toutes sortes de matières premières : précurseur, il détourne des jerseys de T-shirt, des sacs militaires, des couvertures de l'armée et du cuir lavé en robes ou en vestes. Parmi ses coloris de prédilection, le noir et les teintes sourdes dominent, dont un gris spécial baptisé "dust", devenu l'une de ses signatures. Le créateur aime aussi le cuir "comme cette pièce à succès", explique-t-il en montrant "une veste noire en cuir vieilli étriquée avec des manches très serrées obtenues par un artifice technique qu'il invente sous la forme d'une bande de jersey incrustée à l'intérieur du bras. Sa manière de créer, c'est par l'allongement, le corps de la femme, il veut l'étirer".
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En 2003, il quitte Los Angeles pour Paris. Indépendants et transgressifs, ses défilés se teintent de réflexions politiques, dénonçant l'intolérance et le patriarcat : les mannequins sont remplacées par des performeuses de stepping, danse afro-américaine où le corps devient percussion, le sexe de ses modèles masculins est exposé et la force des femmes est célébrée. Comme une réponse à un monde en crise, son engagement s'incarne par des créations plus sculpturales et l'utilisation de couleurs vibrantes.
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Parce que dans l'ombre se cache sa muse-partenaire Michèle Lamy
Le parcours de l'exposition évoque l'importance de son épouse Michèle Lamy, dont la présence se retrouve jusque dans la reconstitution de leur chambre à coucher californienne. Artiste, entrepreneuse, productrice, créatrice de vêtements, collaboratrice et performeuse, cette figure emblématique – c'est elle qui est représentée sur l'affiche de l'exposition – qui défie toute catégorisation personnifie mieux que personne la mode conceptuelle et scandaleuse de Rick Owens.
Alter ego du designer américain, cette avocate, pénaliste de formation, joue un rôle crucial dans sa carrière et son succès. La rencontre a lieu à Los Angeles, aux États-Unis, où elle l'embauche pour réaliser les patrons de sa propre ligne de vêtements Lamy Men. Instinctives, les positions affirmées de Michèle Lamy vont guider le créateur. "Plus tard, il lui avouera ses sentiments. Cela la déstabilise, elle est mère d'une fille et mariée. Ils mettront un an pour officialiser leur relation en 1990. C'est le moment où elle se désintéresse de sa marque et s'oriente vers d'autres choses qui l'amusent plus : la restauration. Elle va acheter un café à Los Angeles, c'est le lieu de rencontre de toute la scène artistique contemporaine, et va le transformer en cabaret spectacle où elle chantera", explique le commissaire d'exposition.
En 1996, Rick Owens va s'installer dans son studio de création et elle va le rejoindre. Elle va investir un parking abandonné pour y construire Les Deux Cafés, un restaurant et un cabaret qui s'imposent comme l'adresse incontournable de Hollywood, situé en face du studio de création et lieu de vie du couple.
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Parce que c'est la première fois que le jardin du Palais Galliera est investi
Rick Owens a eu carte blanche en matière de direction artistique et a réimaginé la manière de présenter son travail dans le musée où il a ouvert les rideaux des galeries donnant sur le jardin pour que la lumière rentre. C'est la première fois que l'établissement présente une exposition à la lumière du jour : "C'est une grande première pour le musée de la mode. Le textile en général est une matière très fragile qu'il faut conserver à l'abri de la lumière, éclairer à 50 lux, c'est-à-dire la lueur d'une bougie pour éviter sa décoloration. En revanche, ce qui était très clair avec Rick Owens, c'est que cette décoloration fait partie de la vie du vêtement et de son évolution", souligne Alexandre Samson.
Fait extrêmement rare, l'œuvre du créateur se déploie également à l'extérieur dans le square du musée où il enveloppe trois statues de la façade du bâtiment de style Renaissance baptisées Sisters of Mercy dans un tissu brodé de paillettes.
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Installées dans le jardin du Palais Galliera, trente Prongs – des sculptures de ciment aux formes brutalistes conçues pour l'occasion – rappellent ses créations de mobilier. Enfin, le parterre floral a été repensé avec des variétés qu'il affectionnait à Los Angeles comme l'ipomée bleue, sa fleur sauvage favorite durant son enfance en Californie qu'il a plantée derrière son atelier à Hollywood. Il a aussi contribué à la direction artistique du restaurant saisonnier du Palais Galliera, Les Petites Mains.
Exposition "Rick Owens. Temple of Love", du 28 juin 2025 au 4 janvier 2026. Palais Galliera, musée de la mode de Paris, 10 avenue Pierre Ier de Serbie, 75116 Paris.
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