Haute couture : Franck Sorbier dévoile L'Eldorado, sa collection hiver 2025-2026, entre mythes et quête philosophique
Depuis trente ans, le couturier perpétue une haute couture exigeante et singulière. Son parcours reflète un engagement artisanal profond, alliant savoir-faire traditionnel et reconnaissance institutionnelle.
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Mardi 9 juillet, dans le cadre du Pavillon Wagram, Franck Sorbier a présenté sa collection haute couture de l'hiver 2025-2026 baptisée L'Eldorado. Depuis trente ans, le couturier fait partie de ces artisans rares qui perpétuent une haute couture à la fois exigeante et singulière. "Le premier label que j'ai eu, c'est Grand Couturier", rappelle-t-il, un titre officiel qui dépend de la Fédération de la couture et du ministère de l'Industrie. Un parcours jalonné de distinctions : entrée dans la fédération du prêt-à-porter de luxe en 1996, statut de membre invité de la couture en 1999, membre permanent en 2005. Mais Franck Sorbier ne s'arrête pas là. "Le titre de maître d'art dépend du ministère de la Culture, c'est un diplôme personnel, tandis que Grand Couturier est un label industriel", souligne-t-il, réaffirmant son ancrage artisanal.
L'Eldorado, c'est d'abord une évocation du mythe et de son héritage complexe. La légende serait née dans la région de Bogota au XVIe siècle, mêlant récits de pagodes d'or en Birmanie et rites ancestraux des Indiens Chibcha, où un seigneur recouvert de poudre d'or se baignait dans un lac sacré. "Cette rumeur a déclenché l'avidité des conquistadors espagnols", rappelle Franck Sorbier, avant de souligner que malgré le pillage et l'effondrement de l'empire inca, le mythe perdure et inspire toujours. Un parallèle puissant avec notre époque marquée par les "nouveaux Eldorados" : l'or noir, la Silicon Valley, la cryptomonnaie, et bientôt le tourisme spatial.
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Le show s'ouvre dans une aura mystique : Mama Quilla, déesse inca, descend lentement, drapée dans une robe fourreau, coiffée d'un diadème céleste, un bâton divin à la main. Sur le podium, c'est un panthéon en mouvement. Les silhouettes dorées des déesses incas croisent celles, plus sombres et conquérantes, de conquistadors. Cuissardes en cuir, manteaux aux velours froissés, organzas métalliques drapés à la main : chaque passage est un choc d'époques, un dialogue textile entre domination et divinité. La maison signe ici sa griffe : compressions dorées, dentelles festonnées, broderies fines – un opéra baroque dans les Andes pré-colombiennes où deux mondes se rencontrent.
Une palette de couleurs oscillant entre or ou plutôt des ors, terre cuite, noir, lie de vin et blanc immaculé. La collection rend hommage à la culture andine, forte de son identité originelle. "J'ai voulu montrer l'or des Incas, les cuirasses des conquistadors, une dame de Lima immortalisée par Irving Penn, un ange de Cuzco, une mariée à l'âme pure", détaille le couturier.
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Mais au-delà de l'esthétique, c'est la démarche même du créateur qui interpelle. Loin des défilés à rallonge, "je me demande si faire des défilés de 45 passages a encore du sens", confie-t-il. Son atelier, qui a réduit ses effectifs à une équipe de "quatre mains", refuse la course effrénée à la production et défend une couture plus humaine. Pour le show, exit le seul recrutement de mannequins classiques, il a notamment fait appel à Sylvia Saint-Martin, première danseuse de l'Opéra de Paris, dont la gestuelle et la présence scénique redonnent vie aux créations : pour le final, en mariée, elle exécute quelques pointes pour clore ce grand voyage dans le temps et l'espace. "Avant, on choisissait les mannequins pour leur capacité à exister sur scène, aujourd'hui ce sont souvent de simples cintres", regrette-t-il.
Autre signature de la maison : le casting inclusif, avec des âges allant de 11 à 40 ans, différentes tailles et personnalités, loin des canons habituels. Cette diversité reflète la réalité, car "la haute couture doit s'adapter à la "femme réelle". Et si la couture est devenue plus événementielle, "à l'époque de Saint Laurent, les femmes portaient la couture au quotidien, aujourd'hui, c'est surtout pour la soirée ou la cérémonie", le couturier entend préserver son âme et sa pertinence.
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À 64 ans, il ne compte pas lever le pied : "J'espère continuer encore au moins dix ans, voire davantage. Ensuite, pourquoi ne pas me consacrer à une vie plus simple, à la manière de Candide ?" Fidèle à son instinct et à sa passion pour l'artisanat – "Je réalise encore 80% de la collection moi-même" –, il incarne une haute couture qui respecte ses origines tout en étant résolument contemporaine. "Cette collection rend hommage à la culture andine, mais aussi à notre petite entreprise, pour travailler dans un environnement apaisé, sans craindre l'avenir, et ainsi préserver notre équilibre", ajoute-t-il, avec une allusion subtile à Candide.
L'Eldorado dépasse le simple cadre d'une collection. C'est une quête, une prise de conscience, un défi lancé au luxe excessif, une invitation à redonner à la mode sa poésie et sa profondeur, loin des chimères dorées. Et, pour le créateur, une quête de sérénité. "Pour notre petite entreprise, l'eldorado, ce serait de travailler dans de meilleures conditions, sans peur des lendemains, l'âme sereine afin de cultiver au mieux notre jardin". Comme Candide.
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