"Histoire de la violence" : l'agresseur présumé d'Édouard Louis débouté
La justice a sèchement débouté vendredi l'agresseur présumé d'Édouard Louis, qui reprochait à l'écrivain de porter atteinte à sa vie privée ainsi qu'à la présomption d'innocence au travers de son ouvrage "Histoire de la violence".
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La décision rendue vendredi par le juge Alain Bourla était prévisible, puisque le magistrat avait taillé en pièces la démarche de "Reda" lors de l'audience du 18 mars. "Reda" estime que le livre du jeune écrivain de 23 ans, très en vue depuis son premier ouvrage "En finir avec Eddy Bellegueule", porte atteinte à sa vie privée et à sa présomption d'innocence.
Dans la même veine d'autofiction que son premier livre, consacré à son enfance dans une famille pauvre et violente, "Histoire de la violence", paru début 2016, raconte la rencontre de l'écrivain un soir de Noël avec un inconnu se faisant appeler Reda. Édouard Louis l'invite chez lui, ils font l'amour, avant que "Reda" ne l'agresse et ne le viole. L'écrivain porte plainte.
La réalité judiciaire rejoint ensuite la fiction, puisque le violeur présumé, sur la base d'un prélèvement ADN, est interpellé et mis en examen en début d'année, au moment où sort "Histoire de la violence". "Reda" est incarcéré depuis. Problème, selon le magistrat, qui a rendu une décision écrite : comment "Reda" peut-il prétendre être "clairement identifiable" dans le livre, alors qu'il ne l'est pas pour l'état civil ? Il n'a pas seulement donné ce nom de "Reda" à Édouard Louis, mais aussi, au moins dans un premier temps, aux enquêteurs. C'est donc un dénommé "Reda M", né au Maroc, qui est mis en examen pour le viol de l'écrivain.
"Reda M", "Riadh B"... ou un autre ?
Mais à l'audience du 18 mars, ses avocats produisent un acte de naissance dans lequel son nom et sa nationalité changent. C'est donc un certain "Riadh B.", né en Algérie, qui affirme se reconnaître dans le roman. Et qui demandait 50.000 euros à l'écrivain et à son éditeur (Éditions du Seuil). "Il convient, faute d'identification établie de manière probante, de déclarer le demandeur irrecevable en son action", a tranché Alain Bourla.Le juge a estimé que de toute façon, les éléments de description trouvés dans le livre étaient "insuffisamment caractéristiques, tant séparément que pris dans leur ensemble", et que loin de désigner le seul "Reda", ils pouvaient "s'appliquer à un très grand nombre d'individus".
Dans son livre, Édouard Louis décrit un homme d'une trentaine d'années, kabyle, brun "à fossettes" fréquentant le quartier de la place de la République à Paris. Il donne quelques détails sur sa vie familiale, ses petits boulots au noir ou sa consommation de cannabis.
Un "signal fort" qui "protège la liberté de création"
Le juge n'est pas allé jusqu'à reprocher à cet homme d'avoir intenté une "procédure abusive", ce qui l'aurait obligé à indemniser la partie adverse. Laquelle s'est félicitée du "signal fort émanant de l'institution judiciaire, protégeant la liberté de création et allant à l'encontre de la censure privée et de la judiciarisation de la littérature", ont écrit dans un communiqué Me Emmanuel Pierrat et Me Julien Fournier, avocats de l'écrivain.Me Bénédicte Amblard, pour les Éditions du Seuil, a elle parlé d'une décision "rassurante." "Cela écarte des tentations pour la suite", a-t-elle dit à l'AFP, rappelant les sommes importantes qui étaient demandées. "Soit cet homme est coupable et la démarche est cynique, soit il est innocent et la démarche est stupide", puisqu'elle met l'affaire sur la place publique, au nom du respect de la vie privée.
Les avocats de "Reda", Me Matthieu de Vallois et Me Thomas Ricard, persistent à voir dans le livre une "violation grave" de la vie privée et de la présomption d'innocence de leur client, puisqu'il "lui prête sans discussion possible des actes criminels qu'il se défend d'avoir commis", ont-ils déclaré à l'AFP.
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