"Ce que je sais de toi" ou les amours contrariées au Caire, un roman "olfactif" et bouleversant d'Eric Chacour
Eric Chacour signe avec "Ce que je sais de toi" un premier roman bouleversant et profond. C’est l’une des plus agréables surprises de cette rentrée littéraire. Le jeune écrivain est sélectionné dans de nombreux prix.
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D’abord, le constat : difficile de croire que Ce que je sais de toi (éditions Philippe Rey) est un premier roman tant son auteur, Eric Chacour, fait preuve d’une rare maîtrise littéraire et stylistique. Au fil de la lecture Ce que je sais de toi se révèle un roman riche, foisonnant, envoûtant. Addictif. On comprend pourquoi le livre est sélectionné dans les listes de nombreux prix littéraires. Nous sommes au Caire, en Egypte, dans les années 1980. Tarek, jeune médecin aisé, fils de médecin, a une autoroute du bonheur devant lui. Tarek aime sa femme, ses proches, son prochain. Il voyait sa vie comme un long fleuve tranquille… Jusqu’à sa rencontre avec Ali. Les certitudes vacillent, volent en éclats. L’inattendu fait exploser la routine, amène le chaos là où tout est ordre et stabilité. "Ali te fascinait. Il y avait chez lui une liberté absolue, une absence de calcul, une exaltation du présent. Il n'était lié par aucun passé et ne concevait pas l'avenir avec les mêmes contraintes que toi. Il se contentait de vivre et tu te surprenais parfois à espérer que vivre serait contagieux". Affrontement de deux mondes, deux univers, deux cultures, deux classes sociales.
Le fleuve détourné
Le destin est-il une fatalité ou ce qu’on écrit soi-même ? "Mektoub. Tout est écrit d'avance, nous ne faisons qu'exécuter une partition dont les notes nous sont transmises au moment de les jouer, les suivantes demeurant un mystère aussi entier que la mélodie qu'elles composeront". Tarek, tout en intériorité, est bousculé dans ses derniers retranchements. À l’image de son pays déchiré entre ses réalités et ses fantasmes. Maniant une langue lumineuse, Éric Chacour, jeune écrivain d’origine égyptienne installé à Montréal, nous fait vivre un tiraillement insoutenable. "La maison attendait de toi que tu diriges ta famille et en assures la perpétuation. La communauté te concédait le statut de ton père contre l’illusion qu’elle avait encore un avenir. Le pays, dans son obsessionnelle quête de stabilité, demandait à chacun d’exalter morale et tradition". Et son désir de vivre. Au lieu de survivre, en cachant ses blessures. Fuir Le Caire ou rester ? Partir c’est mourir un peu. L’exil est-il une facilité ? C'est l'histoire d'un "déraillement". "Celui d'un homme dont la vie ressemble à une partition déjà écrite et qui refuserait de la jouer".
Ce que je sais de toi est un roman d’amour et de combat, de filiation et de renoncement. Il dit un monde en perpétuel mouvement, jonché de victimes mortes ou (sur) vivantes. Il dit l’individu et la société. Un "Tu/Je/Nous", admirablement et subtilement amené par l’auteur dans une narration originale qui donne une plus grande densité à son œuvre. En suivant Tarek et son clan, on entre aussi dans un univers assez complexe. L’histoire se passe dans une famille levantine. Ce roman "olfactif", selon l'expression de l’auteur, qui devait s’appeler à l’origine Ce que je sais de toi sentait l’ail et l’anis est une agréable découverte. Il est empli de grâce et de lumière.
(Ce que je sais de toi, Eric Chacour, éditions Philippe Rey, 22 euros)
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