"La Femme de ménage", "La Prof", "La Psy"… Pourquoi les romans de Freida McFadden, que vous allez peut-être dévorer pendant vos vacances, font-ils un carton en librairie ?
Avec ses thrillers domestiques, la romancière américaine est le nouveau phénomène mondial de la littérature populaire. Son plus grand succès, "La Femme de ménage", a été le livre le plus vendu en France en 2024.
Son œil à travers le trou d'une serrure vous toise sur les étals des librairies. La Femme de ménage, thriller de l'écrivaine américaine Freida McFadden, s'est imposé comme le livre le plus vendu en France en 2024 et approche aujourd'hui des deux millions de copies écoulées, selon son éditeur. Le roman a depuis eu trois suites (Les Secrets de la femme de ménage, La femme de ménage voit tout et La femme de ménage se marie) et sera adapté au cinéma en décembre avec l'actrice Sydney Sweeney dans le rôle-titre.
La discrète romancière, qui s'est placée en tête des ventes dans huit pays, comme le souligne Le Monde, est devenue un phénomène mondial de la littérature populaire. Les publicités pour son dernier ouvrage, La Prof, paru au printemps, s'affichent dans les couloirs des gares et des métros, "ciblant clairement les voyageurs en partance", écrit Libération. Peut-être avez-vous vous-même glissé ses livres dans votre valise pour les vacances. Mais quelle est la recette de l'autrice de 45 ans pour captiver des millions de lecteurs ? Franceinfo a tenté de percer ses secrets.
Une flopée de rebondissements
Dans La Femme de ménage, on suit Millie, une jeune ex-détenue, qui devient gouvernante auprès d'une riche famille new-yorkaise. Sa patronne, Nina Winchester, une bourgeoise au caractère antipathique, aurait, selon la rumeur, tenté de noyer sa propre fille. Que peut bien lui trouver son époux, le "beau" Andrew, au sourire charmeur ? Depuis la petite chambre du grenier de la maison, la femme de ménage va enquêter sur cette famille et découvrir que le "danger se tapit parfois sous des apparences trompeuses", met en garde la quatrième de couverture.
Chez Freida McFadden, "les méchants sont les gentils et les gentils sont les méchants", résume Le Nouvel Obs. "La formule a beau être systématique, elle fonctionne", reconnaît le magazine. La romancière manie l'art des dénouements qui semblent scotcher son lectorat à coup sûr. "Elle parvient toujours à nous berner", assure Virginie, qui chronique les livres de l'autrice sur ses comptes TikTok et Instagram sous le nom Beeonmyshelf.
"On pense comprendre au début où elle nous emmène, mais sa spécialité, c'est de rajouter une information dans l'épilogue qui fait tout basculer."
Virginie, chroniqueuse de livres sur TikTokà franceinfo
Freida McFadden entretient le suspense tout au long du livre. Chaque chapitre se clôt par un rebondissement, suscitant une "curiosité un peu malsaine" qui rend la lecture addictive, raconte une autre fan sur France Inter. "J'ai senti dès le début qu'il y avait quelque chose de prenant. J'ai été scotché, je l'ai terminé le soir-même", confirme à franceinfo Frédéric Thibaud, directeur de City Editions, qui publie les romans de l'Américaine en France. "C'est d'une finesse de Stabilo, tacle de son côté Libération. Mais force est de constater que ça se dévore comme un fast-food, au premier ou au second degré."
Du thriller domestique et des héroïnes féminines
L'univers de Freida McFadden est fait de portes closes, de parquets grinçants et de "personnages qui pourraient être madame ou monsieur Tout-le-monde", explique Frédéric Thibaud. L'écrivaine s'est imposée comme la reine du thriller domestique et psychologique. "On n'est pas dans les codes classiques du polar : ce n'est jamais un flic ou un enquêteur qui résout les énigmes", selon son éditeur français.
"La femme de ménage sauve des femmes qui se font agresser et ce volet féministe m'a plu", témoigne Sylvie D., 67 ans, qui a dévoré la saga. Les héroïnes de Freida McFadden sont souvent des femmes issues de milieux modestes "qui se révèlent très fortes à la fin du livre", poursuit Frédéric Thibaud. "Elles exercent une espèce de vengeance, une revanche sociale, sur les personnages masculins, et ça, c'est quelque chose qui plaît aussi beaucoup." La Prof est par exemple à la fois une intrigue criminelle au sein d'un lycée et une histoire d'emprise dans le couple.
"J'ai voulu que ces deux livres soient des récits de girl power, où les femmes triomphent d'un homme qui a du pouvoir sur elles", confie la romancière au sujet de La Femme de ménage et La Prof. "J'aime ce genre d'histoires, et j'essaie de soutenir les autres femmes autant que possible, donc, dans ce sens, je suis probablement féministe", clame-t-elle dans Le Parisien.
Une écriture accessible qui convertit les néophytes
Avec ses phrases et ses chapitres courts, Freida McFadden parvient à convertir un nouveau public, d'ordinaire éloigné de la lecture. Et c'est certainement son plus grand tour de force. "Faute d'entraînement" et par "manque de concentration", Sylvie D. lisait "très peu" avant de découvrir La Femme de ménage "l'hiver dernier". Pourtant, "en trois ou quatre jours", elle a englouti les 368 pages. "C'est si facile à lire qu'on se dit qu'on pourrait l'écrire nous-même", estime avec satisfaction la sexagénaire.
"Certains vous diront que ce n'est pas de la grande littérature, mais, au moins, cela m'a donné le goût de la lecture."
Sylvie D., lectrice de Freida McFaddenà franceinfo
Virginie loue aussi l'écriture à la première personne et la longueur des romans "qui ne décourage pas trop". "J'ai toujours un peu lu en vacances, mais depuis que je suis tombée sur La Femme de ménage, je m'y suis mise à fond", ajoute la tiktokeuse de 28 ans, qui dévore maintenant en moyenne trois livres par semaine.
Des librairies inondées de nouveautés
En 2013, Freida McFadden sort en autoédition son premier ouvrage, The Devil Wears Scrubs ("Le diable s'habille en blouse"), inspiré de ses souvenirs d'étudiante en médecine. Depuis, l'écrivaine a été repérée par une maison d'édition et a publié une vingtaine d'autres romans.
En France, six ont été traduits et publiés chez City Editions entre janvier 2023 et avril 2025. Trois d'entre eux sont également disponibles chez J'ai Lu, en format poche (La Femme de ménage, Les Secrets de la femme de ménage et La Psy). Deux nouveautés sont attendues : Le Boyfriend, qui paraîtra en octobre, et The Tenant ("La Locataire"), prévu pour février 2026, annonce City Editions.
La maison d'édition française ne s'en cache pas : le rythme d'écriture de Freida McFadden est "un atout". "Il y a un vrai appétit de nouveautés chez ses lecteurs", se réjouit Frédéric Thibaud. "Encore une fois, c'est le côté addictif qui joue, juge-t-il. Ils cherchent rapidement à retrouver l'univers de Freida McFadden après avoir lu un de ses livres."
Mais comment l'autrice parvient-elle à être aussi prolifique ? "Certains suspectent qu'elle se sert de l'intelligence artificielle", rapporte Virginie. Des soupçons balayés par Frédéric Thibaud : "Freida McFadden ne l'utilise pas." "Jamais vous ne pourrez obtenir cette finesse et cette subtilité des personnages avec de l'IA", défend-il.
Le bouche-à-oreille sur les réseaux sociaux
Freida McFadden doit son succès aux réseaux sociaux. Durant ses huit premières années d'écriture en autoédition, l'autrice a pu compter sur la promotion assurée par ses fans sur BookTok, la sous-communauté des amateurs de littérature sur le réseau social chinois. Depuis qu'elle a signé avec une maison d'édition, en 2021, sa carrière a décollé et le nombre de ses admirateurs n'a cessé de croître. Aujourd'hui, ses livres sont commentés par des milliers d'internautes sur TikTok.
Depuis "quatre mois", Virginie a fait de l'écrivaine "le centre de [son] contenu" sur TikTok. Dans l'intervalle, son compte est passé de 4 000 abonnés à 18 000. Sur Instagram, sa vidéo où elle liste des recommandations pour les fans de La Femme de ménage a généré plus d'un million de vues. La jeune femme chronique aussi d'autres auteurs, dans des genres littéraires proches, mais "aucun ne suscite le même intérêt que Freida McFadden" sur les réseaux sociaux, assure-t-elle.
Une écrivaine qui cultive le mystère sur sa vie
Freida McFadden porte un nom de plume et dévoile peu d'informations sur elle. Tout juste sait-on que l'Américaine habite "avec sa famille et son chat dans une maison centenaire de trois étages surplombant l'océan, avec des escaliers qui grincent et gémissent à chaque pas, personne ne pouvant vous entendre si vous criez, lit-on sur son site. A moins de crier très fort."
La quadragénaire est une médecin spécialiste des lésions cérébrales qui vit dans la région de Boston. Elle exerce encore "un jour par semaine" pour ne pas "perdre" la main et garder "l'option" de reprendre un jour à temps plein, confie-t-elle au Parisien, dans un entretien réalisé par mail. Le New York Times a pour sa part dû se contenter d'un échange téléphonique. Freida McFadden ne donne pratiquement aucune interview et ne se plie à aucune séance de dédicaces en raison de son "anxiété sociale". Sur ses rares photos, elle porte une perruque pour préserver son anonymat.
"J'ai toujours été très timide, et j'ai toujours considéré l'écriture comme une activité solitaire", justifie-t-elle auprès du Parisien. "Utiliser un pseudonyme permet par exemple d'être moins affectée par les critiques, puisque ce n'est pas 'moi' qui suis critiquée", explique-t-elle. L'écrivaine se veut aussi mystérieuse que son univers littéraire.
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