Les quatre adaptations des romans de Simenon et une biographie en BD qu'il faut absolument lire

Ne cherchez pas un album de Maigret dans cette collection, il n'y en a pas. Certes, le nom de Simenon est très souvent associé au placide commissaire fumant sa pipe et dont on ne compte plus les adaptations au cinéma et à la télévision.

Et pourtant, le Liégeois de naissance, outre ses soixante-quinze récits de Maigret, a écrit plus d'une centaine de romans. Et c'est dans cet extraordinaire gisement que sont allés piocher les créateurs de la collection Simenon chez Dargaud.

John Simenon, le fils du romancier, voulait adapter en BD depuis quelques années les œuvres de son père. Jusqu'alors, il n'avait pas trouvé les bons projets, la bonne équipe. En 2020, il découvre un album librement inspiré de Simenon, De l'autre côté de la frontière, avec Jean-Luc Fromental au scénario et Philippe Berthet au dessin. Le contact s'établit et le courant passe entre John le fils et Fromental, l'amateur éclairé de l'univers de Simenon. Au bout de trois ans sortent les premiers albums de la série.

"Le Passager du Polarlys"

Le Passager du Polarlys est le premier album publié. José-Louis Bocquet signe le scénario et Christian Cailleaux le dessin. Un huis clos maritime que le dessinateur des Longues traversées sait magnifier. Ce roman noir et septentrional a été imaginé par Simenon en 1930. Maigret n'est pas très loin car c'est une intrigue policière. Toute en ambiance, elle nous transporte sur les mers glacées de Norvège. Le personnage principal est certainement ce bateau, le Polarlys.

"La neige était sale"

Vient ensuite une œuvre graphique exceptionnelle, La neige était sale, dessinée par l'auteur de Sambre, Yslaire. Jean-Luc Fromental se saisit cette fois du scénario. Simenon l'écrit en 1948, après la guerre. Il y a un pays occupé, des crapules et une neige collante. Appuyé par le dessin sombre et expressif d'Yslaire, le récit est dur et l'album sublime.

"Simenon l'Ostrogoth"

La même année, en 2023, un pas de côté est réalisé par les créateurs de la série. Une biographie de Simenon est publiée et c'est le génial Loustal qui la dessine. Simenon l'Ostrogoth est un récit documenté et haut en couleur de la vie très arty de Georges Simenon et de sa première épouse Tigy dans le Paris bouillonnant de l'entre-deux-guerres. Jacques de Loustal fournit un travail impeccable d'une éblouissante palette chromatique. John Simenon, Fromental et Bocquet rédigent pour l'occasion le scénario.

"Les Clients d'Avrenos"

Dans cette collection, il n'y avait jusqu'à maintenant que des hommes. Pour la troisième adaptation parue cette année, Laureline Mattiussi, l'autrice de Cocteau, l'enfant terrible ou de L'Île au poulailler, a pris le relais pour dessiner Les Clients d'Avrenos, roman publié en 1935. Et c'est une petite merveille. Dans cette histoire, deux des trois personnages principaux, Nouchi et Lélia, sont des femmes. Le troisième, Bernard de Jonsac, est un vague diplomate français en poste à Ankara dans les années 1930.

Un trio presque amoureux baigné par la langueur des rives du Bosphore. Un monde qui se délite, sans but et oisif, avec des personnages heurtés par leurs sentiments et leurs contradictions. Le remarquable travail de la coloriste Isabelle Merlet donne à l'album toute l'ambiance "simenonienne".

"La Maison du canal"

Un autre album dessiné par une femme complétera la collection cette année. Édith, autrice confirmée, dont la carrière se partage entre des récits pour la jeunesse (Basil et Victoria) et des albums plus adultes (La Chambre de Lautréamont).

Des moiteurs stambouliotes, on passe avec La Maison du canal, publié en 1930, au paysage austère d'une ferme en Flandre profonde où les canaux se perdent et se pendent comme le chantait Jacques Brel. Les premières pages dont le scénario est assuré par José-Louis Bocquet sont très prometteuses. On attend impatiemment la suite pour septembre ainsi que les autres adaptations pour plus tard.