Festival de la BD d’Angoulême : l'univers magique de Kamome Shirahama au cœur d'une exposition immersive en manga
L'œuvre de la mangaka "L'Atelier des sorciers" est présentée au public à travers le regard passionné de Pauline Croquet, journaliste au "Monde" et commissaire de cette exposition.
J.K. Rowling, J.R.R. Tolkien, George R.R. Martin sont autant de noms qui renvoient à un univers inventé de toutes pièces. À l'évocation de Poudlard, de la Terre du Milieu ou encore de Westeros, des lieux apparaissent ainsi qu'une langue, une histoire et des personnages connus de tous. Un génie réservé aux artistes capables de transcender le monde, jusqu'à imaginer de nouveaux univers parfois plus aboutis que le nôtre. Il n'est pas exagéré d'affirmer qu'avec L'Atelier des sorciers, la mangaka Kamome Shirahama intègre le club et donne vie à sa propre saga unique et intemporelle.
Nichée au sein d'un hôtel situé au cœur d'Angoulême, l'exposition est une véritable immersion dans l'univers magique de l'artiste. En commençant par le lieu, un hôtel particulier du XVIe siècle, aux allures de château enchanté, rien de mieux pour voyager au pays des sorciers. L'artiste japonaise qui découvre l'exposition en même temps que les festivaliers partagent son enthousiasme : "C'est vraiment magnifique, j'ai l'impression d'être dans un monde de magie, un autre univers." Un pari réussi, donc, pour Pauline Croquet, la commissaire d'exposition parvient avec brio à plonger les visiteurs dans le monde magique de Coco et leur expliquer sur quoi repose l'univers de l'héroïne. Une exposition à destination des amateurs et des experts ! Jusqu'au 2 février à l'hôtel Saint-Simon d'Angoulême.
Une sorcellerie méritocratique comme le dessin
Le terme de génie, Kamome Shirahama le révoque sans appel. Pour l'artiste japonaise, le talent ou le don n'existent pas, tout ce qu'on acquiert se fait par l'apprentissage. "Grâce aux défis, on peut vraiment rendre possible l'impossible", affirme-t-elle, dans son œuvre comme dans sa vie. Avec une carrière reconnue de mangaka, qui lui semblait un temps inaccessible, Kamome Shirahama sait l'influence du travail. Contrairement aux univers des autres sagas fantasy, dans L'Atelier des sorciers, la magie est accessible à tous, à condition d'apprendre et de s'exercer. "L'Atelier des sorciers est une analogie du dessin", confirme Pauline Croquet, c'est donc autour de cette idée que la commissaire a construit l'exposition.
La scénographie témoigne du beau geste de l'artiste, mais aussi de sa charge de travail. Si Kamome Shirahama dessine vite, la mangaka est une véritable athlète qui court un marathon. La saga compte treize volumes publiés sous la forme d'une série mensuelle dans un magazine japonais, depuis 2016. Un travail de longue haleine et une technique remarquable que les festivaliers peuvent apprécier grâce aux 120 planches exposées en noir et blanc et en couleur.
Pour Kamome Shirahama, L'Atelier des sorciers est définitivement un manga "pédagogique". Une sorte de roman d'initiation centré autour de la notion d'apprentissage. Son héroïne Coco découvre la magie par l'entremise du sorcier Kieffrey, qui la prend sous son aile. "J'ai appris beaucoup de choses en lisant des mangas qu'on n'étudie pas à l'école, notamment sur les dangers et comment les éviter." Une école de la vie qu'elle tente de reproduire dans L'Atelier des sorciers, bien qu'il soit un seinen, un manga catégorisé pour les adultes.
C'est pourquoi, dans la saga, il est question d'une "magie qui enchante le quotidien", relève Pauline Croquet. Elle s'emploie dans un souci pratique pour surmonter des obstacles, surtout pas dans une démarche ostentatoire censée en mettre plein la vue. Peut-être un lien avec les études de design de la mangaka qui lui donnent le goût du détail et de l'utilité, une chose est sûre, elle y puise l'inspiration pour "inventer des outils" qui prennent forme dans ce monde magique. Et c'est de manière tout à fait pédagogique que nous sommes introduits à l'univers de la mangaka et à ses paysages surréalistes qui rappellent parfois le peintre Salvador Dalí.
Le cadre "cosy" de l'exposition rend hommage à ce goût de l'apprentissage et du détail. Dans une pièce, une malle remplie de fioles côtoie de vieux grimoires, une disposition qui rappelle les intérieurs et les décors travaillés avec finesse de la mangaka. Cet espace a été imaginé par l'équipe en charge de la scénographie qui a "chiné l'ensemble des objets présentés" souligne la commissaire d'exposition.
Changement de décor, dans la pièce "Obscurité", les visiteurs découvrent une face plus sombre de cet univers. Les sorciers peu enclins à partager leurs pouvoirs mentent et privent le reste du monde de l'apprentissage de la magie. Les thèmes abordés par Kamome Shirahama dépassent les simples notions de bien et de mal, et s'étendent à des principes philosophiques que l'artiste illustre par ce propos : "L'accessibilité pour tous, l'écologie ou encore l'universalité."
Manga, comics : une artiste accomplie
Véritable Miranda Priestly (personnage du Diable s'habille en Prada) du manga, avec ses cinq assistantes, Kamome Shirahama travaille sans relâche. Et même lorsqu'elle ne dessine pas, elle réfléchit à la suite de sa saga et nourrit son imaginaire créatif. Tout ce que l'on voit dans L'Atelier des sorciers sort tout droit de sa tête, avant de déléguer à ses assistantes, l'artiste commence par dessiner la structure et montre ce à quoi elle pense, puis les assistantes prennent la relève, mais Shirahama a toujours le dernier coup de crayon.
L'artiste japonaise dessine à l'encre de Chine, mais utilise aussi la technologie pour affiner son geste, le préciser et délivrer un dessin en cohérence avec les émotions des personnages. Il y a beaucoup de couleurs dans les dessins de Kamome Shirahama, dont le manga est esthétiquement très joyeux et coloré. Un fait rare pour ce genre adepte du noir et blanc, mais une liberté prise par la mangaka. L'artiste japonaise tire son expérience des illustrations en couleur des comics américains, dont elle a réalisé certaines couvertures. "Je profite des avantages offerts par ces deux genres" souligne Kamome Shirahama, toujours très attentive à la mise en scène de la psychologie des personnages.
La mangaka sort des sentiers battus et se sert des cases comme des cadres où les personnages s'appuient. "Une manière de dynamiser la mise en scène", confie-t-elle. Une dynamique que nous retrouvons sans peine dans l'exposition. Il s'agit peut-être de la plus petite manifestation du festival, mais l'univers fait certainement partie des plus vastes et des plus vivants.
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