La première vente d'œuvres conçues avec de l'IA chez Christie's n'a pas eu le succès escompté

L'œuvre de l'Américain Charles Csuri, considéré comme l'un des pionniers de "l'art informatique", est partie pour 50 400 dollars, en deçà de la fourchette d'estimation annoncée par la société de vente aux enchères.

Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
L'œuvre "Machine Hallucinations - ISS Dreams - A" de Refik Anadol dans les locaux de Christie's, à New York, le 20 février 2025. (ANGELA WEISS / AFP)
L'œuvre "Machine Hallucinations - ISS Dreams - A" de Refik Anadol dans les locaux de Christie's, à New York, le 20 février 2025. (ANGELA WEISS / AFP)

La première vente de la maison Christie's entièrement dédiée à des œuvres réalisées à l'aide de l'intelligence artificielle (IA) s'est achevée mercredi 5 mars sur un résultat très mitigé, sur fond de critiques relatives à l'IA et la propriété intellectuelle. Quatorze des 34 lots présentés n'ont reçu aucune offre suffisante ou ont été vendus à un prix inférieur au bas de la fourchette d'estimation de Christie's, à l'issue de cette vente, exclusivement en ligne pendant 14 jours.

Une création animée de Refik Anadol (Machine Hallucinations - ISS Dreams - A), parmi les artistes numériques les plus connus au monde, a atteint le meilleur prix, 277 200 dollars, au-dessus de l'estimation. Mais l'autre clou de la vente, Emerging Faces de l'Américain Pindar Van Arman, réalisé en faisant converser deux interfaces d'IA, n'a fait l'objet d'aucune enchère. L'œuvre de l'Américain Charles Csuri (1922-2022), considéré comme l'un des pionniers de "l'art informatique", est partie pour 50 400 dollars, en deçà de la fourchette de 55 000 à 65 000 annoncée par Christie's.

L'œuvre "Emerging Faces" de l'artiste américain Pindar Van Arman au vernissage de l'exposition "Augmented Intelligence", le 20 février 2025, à Christie's, New York. (ANGELA WEISS / AFP)
L'œuvre "Emerging Faces" de l'artiste américain Pindar Van Arman au vernissage de l'exposition "Augmented Intelligence", le 20 février 2025, à Christie's, New York. (ANGELA WEISS / AFP)

Pour Nicole Sales Giles, en charge des ventes d'art numérique chez Christie's et citée dans le communiqué, le résultat de la vente "confirme" néanmoins que collectionneurs et grand public ont "reconnu l'influence et l'importance" des artistes choisis. "La sélection aurait pu être meilleure avec des œuvres représentatives des nouveaux médias et de l'IA", a commenté Steven Sacks, fondateur de la galerie new-yorkaise bitforms, qui expose de l'art numérique depuis 2001.

"Mais la vraie question", a-t-il ajouté, "c'est de savoir si cette vente aurait dû avoir lieu maintenant. (...) Il y a encore besoin d'éduquer les gens, de comprendre l'histoire de ce milieu et, pour les artistes, d'avoir plus de visibilité, d'être exposés et de gagner en crédibilité."

Une pétition contre la vente

S'il s'agissait du premier événement entièrement consacré à des travaux conçus avec l'IA, avec un total réalisé de 728 784 dollars, Christie's et sa concurrente Sotheby's ont déjà proposé plusieurs œuvres lors de ventes précédentes. En 2018, un tableau généré par un algorithme à l'initiative du collectif français Obvious avait été adjugé 432 500 dollars, frais et commissions compris, stupéfiant le monde de l'art.

Un groupe d'artistes avait lancé une pétition pour demander à Christie's de renoncer à la vente achevée mercredi, sans succès. Les quelque 6 490 signataires soulignaient que plusieurs pièces avaient été réalisées avec l'aide de modèles d'IA "connus pour avoir utilisé sans autorisation des travaux protégés par le droit de la propriété intellectuelle". Pour eux, l'opération de Christie's valorise des pratiques qui s'apparentent à du "vol massif de travaux d'artistes humains".

En 2023, plusieurs artistes ont assigné en justice des start-up d'IA générative, notamment les plateformes populaires Midjourney et Stability AI, accusées de nourrir leurs interfaces avec des images dont elles n'avaient pas les droits.

Lancez la conversation

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.