Aurélie Aujard, guide conférencière : "Non à l'ubérisation... et non à la manifestation !"
Ce vendredi 21 août, les guides conférenciers organisent une manifestation devant le musée Carnavalet pour réclamer un meilleur encadrement de leur fonction. Le mouvement de révolte de la profession a commencé en décembre face à des conditions d'exercice de plus en plus précaires et surtout une concurrence de la part de personnes non qualifiées.
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"Au Louvre, j'ai entendu quelqu'un qui se prétendait guide confondre La Vénus de Milo et La Joconde". Aurélie Aujard, qui est guide conférencière, a d'abord cru à une blague, elle rassure quand même : c'est son exemple le plus caricatural. "Dans les grands musées, explique-t-elle, il n'est pas rare qu'une personne qui se prétend guide donne rendez-vous à plusieurs petits groupes et, une fois passé les contrôles, il les rassemble". Le but ? Contourner l'encadrement des visites de musée.
Une fonction encadrée, sans monopole
La fonction de guide conférencier obéit à des règles claires : les professionnels sont diplômés, ils doivent souvent signaler leur arrivée à l'avance, payer à l'avance, et encadrent un nombre limité de personnes. A ce titre, les musées, les associations ou les tour-opérateurs font appel à eux en priorité quand ils proposent une visite guidée. Ces règles s'appliquent dans les monuments historiques et les sites classés « musée de France »"Ce n'est pas une un monopole", insiste Aurélie Aujard, car les musées autorisent certains accompagnateurs -des scolaires ou des conservateurs par exemple- à faire des visites. "Mais nous restons des partenaires naturels des musées car ils savent que nous donnons des informations fiables"
Quand Aurélie Aujard fait des visites au Louvre, elle est contrôlée à l'entrée. Ce qui permet aussi au musée de gérer les importants flux de touristes. C'est pour cela que certains accompagnateurs rassemblent leur groupe après l'accueil. "Il arrive que des surveillants se fassent menacer quand ils demandent leur carte aux accompagnateurs de groupes."
La mobilisation
Ce phénomène, elle l'observe depuis longtemps, mais il tend à s'amplifier : il n'y a plus seulement les étudiants qui cherchent à arrondir leurs fins de mois. Il y a aussi des entreprises dont les guides sont payés au pourboire, des accompagnateurs étrangers sans qualifications et payés au rabais.Mais c'est l'action du gouvernement qui les a fait se mobiliser : depuis décembre 2014, les guides conférenciers craignent une déréglementation totale. A cette époque, ils apprennent dans la presse qu'un article de la loi Macron va modifier leur statut : toute personne titulaire d'un Master pourrait devenir guide. En avril, c'est dans la loi Mandon de simplification des entreprises qu'il est question de réformer ce statut. En mai, le ministère de la Culture s'empare du dossier, et assure que la carte professionnelle est maintenue. Dans la foulée un dialogue commence avec les organisations professionnelles.
Manifester ou pas
Aurélie Aujard participe à ces discussions, elle n'a pas manifesté vendredi 21 août. C'est aussi la position de trois des quatre organisations professionnelles : "On trouve contre-productif de manifester maintenant alors qu'une concertation a été engagée". Elle a participé aux mobilisations des mois précédents, considérant qu'elles avaient eu le mérite d'alerter les pouvoirs publics sur leur sort.Aurélie Aujard a fait dix ans d'études, elle est passée par l'Ecole du Louvre, le courtage en art, l'enseignement. Puis elle a passé un concours d'Etat pour devenir guide conférencière. C'est à ce titre qu'elle revendique une expertise : " Si je vous dis que je suis passionnée de coiffure, vous accepteriez que je vienne couper des cheveux dans votre salon ? ". "Forcément, les gens vont vers ce qui est moins cher, donc il faut des règles qui assurent la qualité". En dehors des connaissances en histoire de l'art, elle évoque dans sa formation l'apprentissage de règles de sécurité, de gestion des groupes, etc.
Du côté des manifestants, on rappelle que rien n'est officiellement acté. "Il faut maintenir la pression" insiste Sophie Bigogne, du collectif Sauvons la profession des guides interprètes conférenciers. "Il s'agit d'une concertation, pas de négociations, renchérit Camille Perriere, du Syndicat professionnel des Guides Interprètes Conférenciers "En janvier, le gouvernement fera ce qu'il voudra." Elle lâche le gros mot du moment : "ubérisation". "On nous dit que notre diplôme serait un frein à l'emploi mais il est pourtant accessible pour ceux qui en ont les compétences." Vendredi 21 août, ils ont bloqué les caisses du musée Picasso, à qui ils reprochent d'embaucher des guides étrangers sans autorisations et d'avoir confié sa médiation à des guides précaires, pas toujours diplômés.
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Dans un contexte de grande précarité des guides conférenciers –avec des salaires allant de 1000 à 2000€ par mois en moyenne, les professionnels sont tendus. Pourtant, l'enjeu est de taille en France, où le tourisme est une question économique et culturelle majeure.
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